Auvergne laboratoire vivant souhaite s’inscrire comme un complément technique et pédagogique aligné avec les préoccupations sociétales de développement durable et d’efficacité énergétique. © Trempe architecte

Publié le 28 octobre 2022 sur voirvert.ca

Retour sur la première conférence de la saison 2022-2023 du Conseil de l’enveloppe du bâtiment du Québec (CEBQ) où l’architecte Richard Trempe traitait de différents aspects de la science du bâtiment.

Au carrefour de l’efficacité énergétique, de l’empreinte environnementale et du cycle de vie, la conception de l’enveloppe doit faire face à de multiples attentes, parfois même contradictoires. Lors des tout premiers cours sur l’enveloppe du bâtiment que je donnais dans un cégep en 1998, l’enveloppe était représentée en termes d’armure et de protection. Ses fonctions étaient simplement définies, il s’agissait d’isoler et de protéger contre l’air, l’eau et l’humidité.  Bien que l’objectif premier de l’enveloppe demeure de s’opposer aux contraintes climatologiques et de s’adapter aux conditions imposées par l’usage, elle ne se limite plus à une « séparation entre deux milieux différents1 ».

La science du bâtiment va maintenant au-delà d’une simple recherche de performance en relation avec l’étanchéité à l’air, à l’eau (ou à la vapeur d’eau) ou encore à sa résistance au passage de la chaleur. Les différents aspects de la science du bâtiment contemporaine amènent des questionnements sur la performance recherchée en matière d’enveloppe, d’efficience, de durabilité, de bien-être ou de cycle de vie pour ne nommer que ceux-là. 

Ces dernières années consacrées à l’étude comparative de bâtiments en usage et au monitorage en conditions post-construction dans le cadre du projet Auvergne Laboratoire vivant m’ont amené à redéfinir drastiquement l’enveloppe.  Elle n’est plus seulement le moyen pour répondre aux exigences d’usage et de climat, elle constitue un pôle central décisionnel et/ou exécutoire permettant au bâtiment de répondre aux enjeux, de plus en plus nombreux, en matière d’efficience, de sobriété, d’empreinte carbone, de durabilité, d’écologie et de biodiversité, sans compter les nouvelles attentes de plus en plus ciblées en matière de confort. 

Les enjeux de 1998, qui prenaient assise sur des barrières à ériger, deviennent de plus en plus des zones de transfert à explorer : régulation et assèchement, diffusion et effusion, stockage de carbone, etc. L’enveloppe se positionne ainsi comme un vecteur au service de la performance globale du bâtiment et non seulement de ses parois. L’enveloppe, perçue autrefois comme « passive », est aujourd’hui « active » à bien des égards.

Ce changement de paradigme appelle à une attitude ouverte de nous tous(tes). Si jusqu’ici il existait des « spécialistes » de l’enveloppe, aujourd’hui, c’est toute une communauté de professionnel(le)s de profils différents qui façonnent l’enveloppe du XXIe siècle. Un nombre de plus en plus grand d’organismes, de chaires universitaires, d’entreprises et d’individus œuvrent dans cette mutation de la science du bâtiment. Les efforts et les résultats sont louables, mais pris un à un, ils ne peuvent être que fragmentaires en réponse à la pratique du bâtiment2 à revisiter.

Le défi de l’enveloppe de demain et de ses acteurs est de considérer toutes les nouvelles attentes, voire les nouvelles exigences, de façon interactive, car chaque nouvel enjeu intégré au bâtiment et à son enveloppe subit l’impact d’un autre. Les enjeux actuels sont de plus en plus clairs et il s’agit maintenant d’y mener des actions en communion avec le reste. Et ce point précis d’harmonisation constitue à mon avis le défi de l’enveloppe de demain. 


* L’auteur est conférencier et architecte chez Trempe Arcitecture.

1. Terminologie encore utilisée dans les codes de construction.

2. L’appellation pratique du bâtiment n’est pas récente mais permet de réfléchie encore à une certaine globalité : « La pratique du bâtiment est avant tout un héritage, modifié par des influences contemporaines comme les climats, l’économie, les mœurs, l’esthétique et les ressources locales en matériaux et en main d’œuvre. » (Hutcheon, 1953 cité par Handegord, 1982 : 5).