Publié le 12 février 2018, mis à jour le 3 octobre 2022
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Maison Ozalée : bilan de l'architecte
La maison passive Ozalée : toujours plus haut!
La rénovation extrême d’un bungalow datant des années 1950 a permis à une famille d’Ahuntsic de mériter l’honneur de décrocher la première certification Passivhaus pour un bâtiment québécois. Cette prestigieuse reconnaissance, la plus exigeante au monde en matière d’efficacité énergétique, est attribuée par le Passivhaus Institute allemand aux rares bâtiments neufs ou rénovés répondant à une longue série d’exigences très strictes. La plus connue réside dans une consommation de moins de 15 kilowattheures de chauffage par mètre carré par année (15 kWh/m2/an), soit environ 90 % de moins qu’une maison répondant aux exigences du Code de construction du Québec.
La Maison Ozalée a également obtenu la certification LEED Platine, la plus haute note de reconnaissance délivrée par le Conseil du bâtiment durable du Canada. « Cette double certification en fait une des maisons les plus écologiques du pays, explique Lucie Langlois, architecte qui a conçu cette rénovation et présidente sortante de l’organisme Maison passive Québec. Il s’agit donc d’un projet phare pour une nouvelle génération de bâtiments à très faible impact environnemental. »
Jusqu’ici, la dizaine de bâtiments canadiens certifiés Passivhaus étaient majoritairement situés dans la région de Vancouver, où le climat plus chaud facilite le respect de cette cible. Le terme maison passive vient du fait qu’en climat tempéré elle peut se passer de systèmes de chauffage et de climatisation en se fiant uniquement à son design « solaire passif » — bonne orientation, étanchéité, isolation et fenestration hyper performantes, ombrages calculés, matériaux massifs stockant la chaleur ou la fraîcheur.
Des clients déterminés
« Mes clients étaient convaincus dès le départ car ils étaient déjà familiers avec le standard Passivhaus et voulaient absolument viser et obtenir cette certification. Chaque fois qu’ils avaient une crainte ne pas l’obtenir, ainsi que la certification LEED Platine, ils ont poussé très fort pour avoir les deux! C’étaient d’excellents clients, très motivés et très exigeants », raconte l’entrepreneur Richard Price, propriétaire de Construction Le Tournesol, de Vaudreuil-Dorion. « Cette certification, on la doit surtout grâce à leur volonté et à leur implication très acharnées », ajoute Lucie Langlois.
Il faut dire que le projet était des plus ambitieux. Un étage a été ajouté et la toiture fut complètement reconstruite. Une grande quantité d’isolation fut ajoutée aux fondations (17,5 po) et à la charpente massive existantes (16 po), majoritairement à l'extérieur afin d’éliminer la plupart des ponts thermiques (pertes de chaleur par conduction à travers les matériaux). Vérifiée par test d’infiltrométrie, l’étanchéité à l’air est excellente et a obtenu un résultat de 0,38 changement d’air à l’heure à 50 pascals (CAH à 50 Pa), soit en deçà de la limite Passivhaus de 0,6 et Novoclimat 2.0 de 1,5 CAH à 50 Pa. Enfin, des fenêtres autrichiennes très performantes (bois/aluminium R-7,9, d’Optiwin), au verre triple, sont orientées pour maximiser les gains solaires passifs. Au final, la maison devrait consommer 14,5 kWh/m2/an de chauffage, selon le logiciel PHPP (Passive House Planning Package).
Dans leur blogue en ligne, les propriétaires d’origine française de la Maison Ozalée, Damien et Déborah Chaveron, se sont dits très heureux de l’obtention de la certification Passivhaus. « Nous sommes très heureux de cette nouvelle de début janvier 2018. Après beaucoup d’efforts de la part de toute l’équipe, nous avons touché au but. Cette certification est pour nous une reconnaissance du gros travail fourni au cours des trois dernières années. (Elle) a tardé un peu car il a fallu produire beaucoup de documents et justifications sur la maison finale. Cela a demandé du travail de la part de toute l’équipe. Notamment, il a fallu refaire une partie des plans pour en fournir une version “tel que construit” et non tel que prévu, car il y a toujours quelques petits changements de hauteur de plafond ou de positionnement de mur lors d’une rénovation. « Damien, qui a un bon esprit scientifique [il est anesthésiste] et une grande capacité d’apprentissage, a été particulièrement impliqué dans la phase de la certification. Il a lui-même produit les calculs de ponts thermiques de toutes les jonctions », mentionne l’architecte.
Celui-ci ajoute : « Au final, nous sommes certifiés et nous avons une maison très confortable et très économe en énergie. Ce fut tout un parcours et beaucoup d’apprentissage pour tous, et nous sommes contents d’y être arrivés et d’avoir la possibilité de participer à l’avancement de l’expertise dans ce domaine au Québec. D’autres projets tout aussi fantastiques sont en cours de réalisation ou de certification au Québec et nous espérons de tout cœur que d’autres suivront très prochainement. »
La rénovation a coûté 595 000 $ avant taxes pour 2 618 pi2 de superficie extérieure, excluant le sous-sol, soit 227 $/pi2 ou 20 % de plus que prévu. Lucie Langlois explique : « Ce coût relativement élevé est attribuable non seulement au concept Passivhaus mais à la rénovation, toujours plus chère, à la déconstruction, au toit plat plutôt qu’à versants, à la finition et à l’isolation du sous-sol et aux éléments de meilleure qualité en général, mais aussi plus durables et plus écologiques. Il faut donc aussi considérer le surcoût accompagnant la démarche de construction écologique inhérente à la certification LEED. Un détail à considérer dans le calcul du coût avec la méthode globale (au pi2) est le fait d’ajouter une épaisseur aux murs extérieurs qui augmente la superficie construite réelle. Pour une maison standard, les murs extérieurs, d'environ 10 po d'épaisseur, représentent environ 12 % de la superficie totale. Pour un projet super-isolé comme celui-ci, avec environ 24 po d'épaisseur au rez-de-chaussée rénové, les murs extérieurs représentent environ 23 % de la superficie totale. Évidemment, lorsqu’il s’agit d’un tel projet pilote, on ne peut comptabiliser tout le temps de travail ayant été nécessaire qui représenterait également un surcoût des honoraires des professionnels par rapport a un projet standard. »
Pour tous les détails :
Formation complète de 10 jours en français menant à l'examen pour l'obtention du titre Concepteur ou Consultant certifié Bâtiment passif, du 13 avril au 27 mai 2018. Offerte par Maison Passive Québec avec LA Maison Passive Services (France). Le formateur sera Maxime Thillaye Du Boullay, ingénieur et spécialiste de la norme Passivhaus, nouvellement installé au Québec : maisonpassivequebec.com