Les antennes situées sur ou à proximité des écoles inquiètent partout dans le monde, comme ici à Denver au Colorado. © ABC News

Dix-huit enseignants torontois ont refusé de travailler en octobre en raison d'inquiétudes concernant le rayonnement émis par une tour de téléphonie cellulaire près de leur école secondaire. Début novembre, ils étaient retournés au travail après avoir reçu l'assurance qu'un consultant indépendant chercherait des solutions pour y remédier, selon le média CP24.

Le site Web de Santé Canada affirme que les champs électromagnétiques (CEM) de radiofréquence/micro-ondes émis par les antennes et téléphones cellulaires ne présentent « aucun risque pour la santé » aux niveaux courants d'exposition. Les seuls effets aigus reconnus par le ministère suite à des niveaux élevés d'exposition sont l'échauffement des tissus (réchauffement de la peau) et la stimulation nerveuse pouvant provoquer une sensation de picotement de la peau. « Tout autre effet néfaste sur la santé ne se produirait qu'en cas d'exposition intense, prolongée et directe aux CEM de radiofréquence, a déclaré Santé Canada, ajoutant que les preuves scientifiques n'indiquent pas un risque accru de cancer lié à l'exposition aux CEM de radiofréquence ''aux niveaux autorisés par les lignes directrices canadiennes en matière d'exposition'', selon CP24

Ces affirmations ont été contredites par plusieurs experts indépendants dans une lettre adressée notamment au ministre de l'Éducation de l'Ontario, Stephen Lecce.Réunis par l'Environmental Health Trust (EHT), ces experts dont le Dr Anthony B. Miller, ancien directeur des études épidémiologiques à l'Institut national du cancer, réclament une politique scolaire rigoureuse visant à atténuer l'exposition des élèves, des enseignants et du personnel aux CEM émis par les antennes et amplificateurs de téléphonie cellulaires. Ils écrivaient : « De nombreuses données scientifiques publiées indiquent que les rayonnements de radiofréquence, à des niveaux conformes aux limites fixées par le gouvernement fédéral, peuvent provoquer des cancers, un stress oxydatif accru, des dommages génétiques, des modifications structurelles et fonctionnelles du système reproducteur, des troubles de la mémoire, des problèmes de comportement et des effets neurologiques. Nous considérons que les rayonnements de radiofréquence (RF) sont cancérigènes pour l'homme sur la base de l'ensemble des preuves actuelles. Nombre de ces effets pourraient être irréversibles et avoir de graves conséquences pour l'avenir de nos enfants. »

Pour illustrer les recherches indiquant que les réglementations fédérales sont inadéquates pour protéger la santé, ils citaient une revue de la littérature signée en 2022 par le biologiste espagnol Alfonso Balmori, intitulée Evidence for a health risk by RF on humans living around mobile phone base stations : From radiofrequency sickness to cancer (Preuves d'un risque sanitaire lié aux radiofréquences pour les personnes vivant à proximité des stations de base de téléphonie mobile : de la maladie des radiofréquences au cancer). Il concluait notamment : « Les études réalisées sur des animaux ou des arbres situés à proximité d'antennes de station de base, qui ne peuvent pas être conscients de leur proximité et auxquels les effets psychosomatiques ne peuvent jamais être attribués, revêtent une importance particulière. »

En 2020, un article d'un professeur de génie du Michigan, JM Pearce, a passé en revue « l'ensemble important et croissant de preuves que l'exposition humaine aux radiofréquences des stations de base de téléphonie cellulaire a des effets négatifs sur la santé ». Comme d'autres experts, il a recommandé d'éloigner les antennes à moins de 500 mètres des immeubles habités tels les écoles et les hôpitaux afin de protéger les entreprises de toute responsabilité future.

La lettre des experts de l'EHT citait notamment une étude comparant des personnes vivant à 80 mètres d'une antenne relais et des témoins sains vivant à plus de 300 mètres. Les premiers étaient exposés à des niveaux de radiofréquences plus élevés et présentaient une formule sanguine inquiétante. « Le groupe vivant plus près des antennes présentait une fréquence statistiquement plus élevée de micronoyaux et une augmentation de la peroxydation des lipides dans le sang; ces changements sont considérés comme des biomarqueurs prédictifs du cancer... Aujourd'hui, de nombreux scientifiques sont d'avis que le poids des preuves actuelles examinées par des pairs permet de conclure que les rayonnements de radiofréquence doivent être considérés comme un agent cancérogène pour l'homme (Hardell et Carlberg 2017, Peleg et al, 2018, Miller et al 2018). » 

Une étude sur l'exposition à long terme de rats aux rayonnements de radiofréquence, réalisée par le National Toxicology Program des États-Unis pour un montant de 25 millions de dollars, a révélé des lésions de l'ADN, des lésions cardiaques, une augmentation des tumeurs cérébrales et une augmentation des tumeurs cardiaques, considérées comme des « preuves évidentes de cancer ». « Des chercheurs du célèbre Institut Ramazzini, en Italie, ont ensuite publié des résultats montrant que des animaux de laboratoire exposés à des niveaux de radiofréquences comparables à ceux des réseaux de stations de base des tours de téléphonie mobile ont développé les mêmes types de cancers que ceux constatés par le programme national de toxicologie américain dans son étude à grande échelle sur les animaux. »

Une étude australienne a révélé que dans les maternelles situées à moins de 300 mètres d'antennes cellulaires, les enfants étaient exposés à un rayonnement trois fois plus intense que ceux fréquentant une maternelle à plus de 300 mètres de distance.  « Une étude réalisée par Meo et al. en 2019 sur des élèves d'écoles situées à proximité d'antennes-relais a révélé que l'exposition accrue aux radiofréquences était associée à des effets sur les capacités motrices, la mémoire et l'attention. Parmi les autres problèmes de santé associés aux antennes relais dans les études de recherche, citons les problèmes neuropsychiatriques, le diabète, les maux de tête, les troubles du sommeil et les dommages génétiques. Ces recherches continuent de s'accumuler après la publication en 2010 d'une étude de référence portant sur 56 études faisant état d'effets biologiques constatés à de très faibles intensités de rayonnement sans fil, notamment des effets sur la reproduction, la perméabilité de la barrière hémato-encéphalique, le comportement, les changements cellulaires et métaboliques et l'augmentation du risque de cancer (Lai et Levitt 2010). »

Les experts de l'EHT ont conclu : « Les limites d'exposition du Canada et des États-Unis sont dépassées et ne protègent pas la santé du public, en particulier celle des enfants et du personnel exposés chaque jour à l'école. C'est pourquoi la New Hampshire State Commission sur la 5G et la Santa Clara Medical Association recommandent de limiter les antennes-relais à proximité des écoles.

Veuillez noter que dans plusieurs pays, les gouvernements ont mis en place des politiques visant à protéger les enfants, les femmes enceintes et les personnes médicalement fragiles en classant les zones où se trouvent des habitations, des hôpitaux et des écoles comme des "zones sensibles". Ces pays réduisent l'exposition dans les zones "sensibles" et ont mis en place des mesures strictes de surveillance et de conformité. »