À part le risque de lessivage des plastiques dans la nourriture, il n'existe pas de preuves concluantes, reproduites et publiées dans des revues scientifiques que la cuisson au micro-ondes génère des composés nocifs dans la nourriture. Ceci contrairement à la consommation répétée de charcuteries qui contiennent des nitrites cancérogènes et d'aliments caramélisés ou brûlés par la cuisson à haute température qui génère des dérivés de la réaction Maillard tout aussi cancérogènes, comme l'acrylamide. Sans oublier les émissions d'hydrocarbures aromatiques polycycliques générées par la friture qui sont classées « probablement cancérogènes » pour les travailleurs surexposés.
Selon Santé Canada : « Les micro-ondes ne modifient pas les composants chimiques des aliments. Elles ne devraient donc pas entraîner la formation de nouveaux composants comme des substances carcinogènes. » Toutefois, le Ministère déconseille de chauffer le lait de bébé au micro-ondes : « Lorsque vous réchauffez une préparation pour nourrissons dans un four à micro-ondes, le contenant (ou le biberon) peut demeurer froid au toucher même si la préparation est extrêmement chaude, ce qui pourrait entraîner de graves brûlures pour le bébé. » De plus, selon le ministère de la Santé et de services sociaux du Québec, le lait maternel perd une partie de ses vitamines et de ses anticorps lorsqu'il est réchauffé dans un four à micro-ondes parce qu'il chauffe inégalement.
Toutefois, ces fours émettent des quantités non recommandables de micro-ondes soupçonnées cancérogènes et pouvant causer notamment des cataractes. Voici une vidéo sur le sujet que viens de produire la toxicologue ontarienne Magda Havas qui a un site extraordinaire sur l'impact des champs électromagnétiques sur la santé.
Même neufs, il est permis que ces fours émettent des micro-ondes dans la pièce, nous a expliqué par courriel la docteure et chercheure en santé environnementale néo-zélandaise Mary Redmayne. « En 2013, j'ai mesuré avec un équipement professionnel les expositions à différentes distances d'un four à micro-ondes en fonctionnement au Centre de recherche australien sur le cerveau où je travaillais. Il y avait un mur à environ 5 pieds devant le four. Je pouvais facilement mesurer les ondes à environ 3 pieds de l'autre côté du mur. La porte du four ne semblait pas avoir été endommagée, elle se fermait correctement. Ce n'est vraiment pas une bonne idée de se tenir près d'un appareil lorsqu'il fonctionne, ni de l'avoir à hauteur du corps ou de la tête. »
Une étude dérangeante
Sachez par ailleurs qu'à la fin des années 1980, des chercheurs suisses ont déjà réalisé une étude indiquant que la cuisson au micro-ondes est néfaste. La cause Hertel c. Suisse (lire ici l'arrêt rendu le 25 août 1998 par la Cour européenne des droits de l’homme concerne un différend sur la liberté d’expression en lien avec la publication de leur étude.
Hans Hertel, diplômé en sciences de l’École polytechnique fédérale de Zurich, est l’auteur d’une thèse soutenue à l’Institut des sciences vétérinaires de Zurich. Retraité, il réside à Wattenwil (canton de Berne) et il poursuit à titre privé des recherches dans un laboratoire qu’il a installé pour son propre compte. Il a été le premier savant à imaginer et à mener à bien une étude qualitative sur les effets que peuvent avoir, sur le sang et la physiologie humaine, les aliments passés par le four à micro-ondes. Cette étude, brève mais bien menée, montrait fermement du doigt le pouvoir de dégénérescence des fours à micro-ondes et de la nourriture y étant préparée. Elle fut réalisée avec Bernard H. Blanc, professeur de biochimie à l’université de Lausanne et conseiller technique à l’École polytechnique fédérale de Lausanne ainsi qu'à l'Institut universitaire de biochimie. L'étude fut publiée en 1992 dans le Journal Franz Weber, publié par une fondation militant pour le bien-être des animaux.
La justice suisse a jugé que les affirmations de Hertel constituaient une atteinte à la réputation des entreprises de l'industrie alimentaire et menaçaient l'ordre économique.
Hertel a porté l’affaire devant la Cour européenne des droits de l’homme - CEDH, alléguant une violation de son droit à la liberté d’expression protégé par l'article 10 de la Convention européenne des droits de l'homme.
La Cour lui a donné raison pour les motifs suivants.
1. Protection de la liberté d'expression : Les critiques sur des sujets d'intérêt général, y compris des recherches scientifiques, sont essentielles dans une société démocratique. Hertel exprimait une opinion scientifique qui devait pouvoir être débattue librement.
2. Absence de proportionnalité : La décision suisse d’interdire totalement les publications de Hertel n’était pas proportionnée au but légitime poursuivi (protection de la réputation des industriels et de l'ordre économique). D’autres moyens moins restrictifs auraient pu être envisagés.
3. Pas de preuve suffisante de nuisances économiques : Les autorités suisses n’avaient pas démontré que les affirmations de Hertel avaient un impact négatif majeur sur l’industrie alimentaire ou sur l’intérêt public.
En conclusion, la Cour a condamné la Suisse à indemniser Hertel pour atteinte à ses droits, affirmant que la liberté d’expression, même lorsqu’elle est controversée ou dérangeante, est un pilier fondamental des sociétés démocratiques.
Cet arrêt est souvent cité comme un précédent important en matière de protection de la liberté d'expression scientifique et de la nécessité de proportionner les restrictions à cette liberté.
André Fauteux
> Découvrez l'article de Maria Acosta paru en 2008 :
Four à micro-ondes : bénéfique ou maléfique?
et aussi La cuisson au micro-ondes et votre santé