Pour toucher à court terme le Prêt canadien pour des maisons plus vertes, les gens ayant exécuté avant le 3 décembre des rénovations écoénergétiques admissibles doivent soumettre leur demande d’évaluation énergétique après travaux avant le 20 décembre auprès du populaire programme québécois Rénoclimat. Sinon, l’évaluation après travaux et l’obtention du prêt seront reportées après le 1er avril 2025 « afin de respecter le budget alloué au programme Rénoclimat par le Gouvernement du Québec », qui est épuisé. 

L’extension jusqu’au 20 décembre a été accordée après que TVA Nouvelles, dans un reportage diffusé le 28 novembre, eut raconté l’histoire d’un couple de l’Estrie qui avait dépensé 62 000 $ pour un système géothermique mais qui désespérait de ne pouvoir recevoir avant avril le prêt sans intérêts offert par la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL). Remboursable sur dix ans, ce prêt personnel sans intérêts varie entre 5 000 $ et 40 000 $, selon l’ampleur des travaux.

Après le 20 décembre, pour toucher rapidement leur prêt s’ils ont fait réaliser l’évaluation énergétique avant travaux, ils devront payer de leur poche une évaluation privée faite par un évaluateur Rénoclimat/ÉnerGuide, au coût d’environ 300 $. « Les évaluations ÉnerGuide avant et après travaux continuent d’être requises dans le cadre du programme fédéral afin de pouvoir confirmer l’admissibilité des rénovations, explique Audrey-Anne Coulombe, relationniste à la SCHL. Il n’est pas nécessaire que ces évaluations soient obtenues par l’entremise du programme provincial Rénoclimat. Les évaluations peuvent être réservées par l’entremise de tout fournisseur de services enregistré par Ressources naturelles Canada (RNCan). Veuillez noter que tous les fournisseurs utilisés dans le cadre de Rénoclimat sont inscrits auprès de RNCan et qu’il est recommandé de continuer à travailler avec le même fournisseur si un propriétaire a déjà commencé le processus d’octroi de prêts. » 

Mesures admissibles

Les mesures admissibles au prêt de la SCHL sont affichés dans la liste des travaux admissibles dans le cadre de la Subvention canadienne pour des maisons plus vertes (le programme est fermé aux nouvelles demandes, le budget étant également épuisé). Il s’agit de travaux d’isolation, d’étanchéité, de fenestration, des systèmes de chauffage et d’énergies renouvelables et de mesures de résilience (batteries pour système photovoltaïque, membrane d’étanchéité de toiture ou murs de sous-sol, imperméabilisation des vides sanitaires).
En attendant le programme québécois de subvention à l’achat et l’exploitation d’un système solaire photovoltaïque, qu’Hydro lancera en 2026, les entreprises et fiducies de placement immobilier peuvent bénéficier du nouveau crédit d'impôt fédéral à l'investissement (CII) pour les technologies propres. Il peut atteindre jusqu’à 30 % du capital investi entre le 28 mars 2023 et le 31 décembre 2034.

Par ailleurs, les évaluations avant travaux sont offertes dès maintenant par le programme Rénoclimat qui subventionne les travaux d’isolation, d’étanchéité, le remplacement des portes et fenêtres ainsi que l’installation d’un ventilateur récupérateur de chaleur certifié par le Home Ventilating Institute. « Depuis le 1er novembre 2024, les frais de 150 $ que vous avez payés lors de l’évaluation avant travaux seront remboursés en même temps que le paiement de votre aide financière. »

Les évaluations avant et après travaux permettent respectivement de déterminer les travaux prioritaires dans chaque habitation et de confirmer les améliorations réalisées. Chaque évaluation comprend un test d’infiltrométrie mesurant le degré d’étanchéité de la demeure et d’établir sa cote énergétique sur l’échelle fédérale ÉnerGuide.

Le Gouvernement du Québec propose aussi les programmes Éconologis pour les ménages à faible revenu, Novoclimat pour les maisons neuves haute efficacité, et Chauffez vert. Ce dernier subventionne le remplacement d’un chauffe-eau ou d’un système de chauffage central au mazout ou au propane par une système à l’énergie renouvelable (hydroélectricité, géothermie, biomasse forestière, bois, éolien, solaire ou une combinaison de ces énergies). Tout comme Rénoclimat, ce programme s’adresse à tout type d’habitation d’au plus trois étages et 600 m2 de superficie, mais il n’exige pas de test d’infiltrométrie, pas plus que le très populaire nouveau programme LogisVert d’Hydro-Québec.  

Celui-ci fait pâlir le programme Rénoclimat en offrant de généreuses aides financières pour encourager, tant en rénovation et/ou qu’en construction, l’isolation de toiture et le calfeutrage, ainsi que l’installation d’un système géothermique, d’une thermopompe haute efficacité, d’un accumulateur de chaleur jumelé à une fournaise, d’une cuisinière à induction, d’une sécheuse à thermopompe, d’un chauffe-piscine solaire et (en construction seulement, d’un échangeur d’air ENERGY STAR ou des capteurs solaires thermiques pour eau chaude. Par exemple, Hydro offre jusqu’à 6 700 $ en aide financière pour installer une thermopompe qui peut réduire la facture de chauffage jusqu’à 40 %.

Budgets : Rénoclimat amputé, Hydro doublé

Dans le Plan de mise en œuvre 2024-2029 du Plan pour une économie verte québécois, le budget accordé à Rénoclimat en 2024-2025 est de 124 millions de dollars (M$). Par contre, pour les trois prochaines années le budget annuel a été amputé de moitié, à environ 65 M$  par année ou près de 200 M $ au total de 2025-2026 à 2028-2029. 

Comparativement, Hydro-Québec a plus que doublé ses budgets d’efficacité énergétique alors que la société d’État entend investir 155 à 185 milliards de dollars d’ici 2035 pour doubler sa production d’électricité d’ici 2050 afin de décarboner le Québec (dont le parc de véhicules) et répondre à la croissance économique.

Ainsi, ses budgets d’efficacité énergétique passeront à plus de 500 M$ en 2025, comparativement aux 150 M$-200 M$ prévus en 2022-2023, selon son relationniste Cendrix Bouchard. Le porte-parole Cendrix Bouchard précise : « Nos appuis financiers vont augmenter pour couvrir jusqu’à 50 % du coût d’achat d’équipements écoénergétiques, comme les thermopompes, les thermostats intelligents et les contrôleurs de charge pour chauffe-eau. Nous visons l’installation de 700 000 équipements énergétiques performants ou connectés chez nos clients résidentiels et commerciaux d’ici 2035, ce qui permettrait de faire passer de 3 % à 25 % la proportion des résidences du Québec dotées de tels équipements. » Ainsi, il réfère au  bilan annuel de l’hiver dernier qui a permis de réduire la demande de pointe de 999 mégawatts (MW), dont 352 MW dans le secteur résidentiel, grâce aussi aux offres de sa division Hilo (thermostats et compteurs émetteurs de micro-ondes nocives) et de la Tarification dynamique.

M. Bouchard ajoute : « Notre budget total en efficacité énergétique prévu est de 10 à 12 milliards à l’horizon 2035, soit cinq fois supérieur à tout ce qui a été investi dans les 20 dernières années. » Le budget d’efficacité énergétique représente donc un dixième des investissements prévus au cours de la même période en nouvelle production électrique. Selon le Plan d’action 2035 de la société d’État, la cible d’efficacité énergétique d’ici 2035 est de 21 TWh (annuellement et de façon récurrente), soit sept à dix fois moins que les jusqu'à 200 TWh additionnels (le double des ventes de 2023) qui seraient requis pour décarboner le Québec d’ici 2050. « D’ici 2035, nous planifions l’ajout de 60 TWh, soit entre 8 000 et 9 000 MW de puissance additionnelle. C’est équivalent à trois de nos plus grands ouvrages hydroélectriques : l’aménagement Robert-Bourassa (LG-2), Manic-5 et le complexe de la Romaine », précise le Plan d’action en page 4.

Reste à voir si la croissance de la demande prévue est réaliste. On sait notamment que le gouvernement Legault souhaite que le nombre de véhicules électriques sur nos routes passe de 300 000 actuellement à deux millions en 2030, malgré la disparition des subventions en 2027. Et si l’interdiction prévue de la vente des véhicules à essence sera bel et bien en vigueur en 2035, ou repoussée comme le prédit Louis-Gilles Francoeur, l’ancien journaliste en environnement vedette du quotidien Le Devoir, dans la préface de l’excellent nouveau livre La guerre des fossiles.