La prochaine génération de téléphones mobiles, appelée 5G, signifie une exposition de plus près aux antennes des téléphones mobiles installées sur les poteaux électriques et les lampadaires du voisinage – une exposition qui peut être plusieurs fois plus intense que celle émise présentement par de telles antennes (qui sont généralement installées très haut sur de grandes tours). © https://whatis5g.info/
La prochaine génération de téléphones mobiles, appelée 5G, signifie une exposition de plus près aux antennes des téléphones mobiles installées sur les poteaux électriques et les lampadaires du voisinage – une exposition qui peut être plusieurs fois plus intense que celle émise présentement par de telles antennes (qui sont généralement installées très haut sur de grandes tours). © https://whatis5g.info/

Adapté d'un texte de Kurt Cobb, publié dans Resource Insights le 20 janvier 2019

En 1776, le philosophe Jeremy Bentham écrivit une phrase qui continue d’être au centre de notre façon de penser moderne : « Le plus grand bonheur du plus grand nombre est la mesure du juste et de l’injuste. »

Cette phrase s’est transformée en la phrase familière citée dans le titre de cet article. Le bonheur a cependant d’abord été réinterprété en tant que « bien », c’est-à-dire quelque chose qui procure du plaisir, un mouvement vers une sorte d’hédonisme. Le « bien » est toutefois devenu associé aux « biens », c’est-à-dire aux objets que les consommateurs et les entreprises achètent pour promouvoir leurs objectifs personnels et professionnels.

Ce décalage par rapport au sens originel de ce que Bentham a appelé son « axiome fondamental » explique en partie pourquoi nous sommes dépendants de la croissance économique et du consumérisme qui en découlent. Nous croyons que les « biens » sont bons pour nous et que davantage de « biens » apporteront toujours plus de bien dans leur sillage.

Mais maintenant, je voudrais examiner la deuxième partie de cette phrase : « le plus grand nombre ». Il est tout simplement logique pour la plupart d’entre nous qu’une personne sensée soutiendrait l’idée du plus grand bien pour le plus grand nombre. Un tel cadre ne permet-il pas de maximiser les chances du plus grand nombre de personnes dans la vie? Bien sûr, tout dépend de ce que l’on entend par « chances dans la vie ».

Ce que je veux souligner, c’est que « le plus grand nombre » implique une doctrine autorisant des « pertes acceptables ». Si les avantages nets de toute ligne de conduite sont mesurés pour la société dans son ensemble plutôt que pour chaque individu, des actions qui entraînent la mort beaucoup de gens sont justifiées sur la base des avantages pour ceux qui restent en vie. De tels avantages sont censés compenser les pertes subies par les personnes décédées et par les proches du défunt.

C’est le marché que nous avons conclu, et cela a provoqué le chaos partout.

Un ami et un collègue m’ont fait remarquer que la société moderne cherchait à augmenter ses profits en augmentant les prix ou en réduisant la qualité, voire les deux. Un effet secondaire fréquent est la création de nouveaux risques pour la santé et le bien-être humains. Ceux-ci ne sont pas intentionnels, mais résultent d’une baisse de la qualité ou de l’ajout de fonctionnalités ou de fonctionnalités qui imposent des marges plus élevées, mais causent également du tort.

Le principe de précaution est une alternative qui appelle à une évaluation minutieuse des risques avant de rendre publique toute technologie potentiellement dangereuse. L’Union européenne a adopté cette approche dans certains domaines.

Mais, comme une grande partie de la société moderne fonctionne sur le principe opérationnel du plus grand bien pour le plus grand nombre, nous sommes maintenant confrontés à de multiples catégories de « pertes acceptables ». Chaque fournisseur de produits dangereux ou de pratiques risquées tente de minimiser les pertes et de ridiculiser les victimes.

Ces jours-ci, je pense beaucoup aux âmes souffrantes qui sont sensibles aux rayonnements micro-ondes émis par les téléphones portables, les tours de téléphonie cellulaire et d’autres sources. Leur nombre s’accroît au fur et à mesure que nous augmentons continuellement la quantité de tels rayonnements émis dans l’environnement. Beaucoup doivent quitter la ville et se diriger littéralement vers les collines ou les zones mal desservies par les antennes des cellulaires. (Divulgation complète : je travaille actuellement en tant que consultant auprès d’organisations préoccupées par les effets du rayonnement des micro-ondes sur la santé.)

Jusqu’à relativement récemment, les symptômes de ces personnes étaient considérés comme de simples réactions psychosomatiques ou, à tout le moins, non reliés à un rayonnement de micro-ondes. Au fur et à mesure que les preuves des effets de ce rayonnement sur les cellules vivantes s’accumulent – la publication de l'étude du National Toxicology Program l’année dernière a démontré un lien évident avec le cancer et des dommages à l’ADN – les « pertes acceptables » se multiplient.

La prochaine génération de téléphones mobiles, appelée 5G, s’est heurtée à une opposition, notamment parce que cela signifie une exposition de plus près aux antennes des téléphones mobiles installées sur les poteaux électriques et les lampadaires du voisinage – une exposition qui peut être plusieurs fois plus intense que celle émise présentement par de telles antennes (qui sont généralement installées très haut sur de grandes tours).

Attendez-vous à ce que le nombre de personnes électrosensibles augmente en flèche, car le seuil de tolérance de celles qui ne le sont pas encore sera rapidement dépassé.

On nous dit que tout cela est fait pour permettre l’essor de technologies aussi extraordinaires que les voitures sans conducteur et l’Internet des objets. Mais ce ne sont que des paravents pour le véritable agenda des géants de la téléphonie mobile. Ils veulent éviter les prix réglementés qui découlent de l’installation de câbles à fibres optiques jusqu’à votre domicile - où vous pouvez décider de déployer un système sans fil ou non.

Ces entreprises amènent plutôt le câble jusqu’à un poteau électrique près de chez vous, installent une puissante antenne de téléphonies cellulaire sur ce poteau, puis envoient un signal 24 heures sur 24, 7 jours sur 7 dans votre maison. Ils appellent cela le « haut débit sans fil fixe » et cherchent à déployer ce réseau parce qu’ils pourront alors vous facturer ce qu’ils veulent. Les prix des services sans fil, aux États-Unis (tout comme au Canada), ne sont pas réglementés. (Fait «amusant» : 95% du système « sans fil » est câblé, car les câbles constituent le moyen le plus économe en énergie et le plus rentable de transférer des données.)

Pour ce marché de dupe, vous êtes exposé 24 heures sur 24 à un rayonnement d’antennes beaucoup plus intense, même si vous n’achetez pas leurs services hors de prix. En effet, beaucoup de vos voisins se verront offrir ce service, et certains d’entre eux le prendront bêtement, vous exposant ainsi à ses rayonnements, quoi que vous fassiez. De plus, les entreprises de téléphonie mobile peuvent de toute façon installer ces antennes 5G dans le seul but d’obtenir une couverture complète pour leur système.

L’industrie essaiera de vous faire comprendre à quel point il est merveilleux d’avoir un système entièrement sans fil. Mais vous pouvez avoir cela grâce à votre système Wi-Fi avec beaucoup moins d’exposition aux rayonnements – ce qui représente quand même un danger pour vous, mais pas autant (que la 5G) quand il est allumé et, bien sûr, vous avez le pouvoir de l’éteindre quand vous ne l’utilisez pas.

L’industrie prétend que la 5G et ses prédécesseurs sont tous sans danger. Cela rappelle les prétentions sur l’amiante, la fibre miracle qui nous a permis de fabriquer des matériaux de construction résistants au feu, mais qui est devenue la source d’un cancer répandu. Cela me rappelle aussi ce que l’on disait à propos de la cigarette. Après tout, l’utilisation du téléphone cellulaire est volontaire, tout comme le fait de fumer la cigarette. Hélas, les ravages de la fumée secondaire ont finalement sensibilisé le public aux dangers généralisés de la cigarette. De la même façon, je pense que l’exposition involontaire à des rayonnements de plus en plus intenses d’antennes du cellulaire sensibilisera le public à un danger beaucoup plus important que ne l’étaient auparavant l’amiante ou la fumée secondaire.

Le Médecin-chef des États-Unis a déclaré au public en 1926 que l’essence au plomb était sans danger. Aujourd’hui, la branche scientifique du gouvernement américain ne prétend même plus que les téléphones portables et leurs antennes n’entraîneront pas de « pertes acceptables ». Au lieu de cela, on nous dit que les dégâts ne seront pas tellement graves.

Nous pourrions attribuer toutes ces tragédies à des individus sans scrupules. Mais ce n’était pas un secret pour mon père, qui avait grandi pendant la Grande Dépression, que fumer était mauvais pour sa santé et que cela créait une forte dépendance. Au début, la production d’essence au plomb a entraîné de nombreux décès et empoisonnements sur de nombreux lieux de travail. Et pourtant, ils ont été ignorés car le plomb dans l’air provenant des gaz d’échappement des voitures était considéré comme si diffus qu’il ne causerait jamais de torts à l’homme – et, comme on pouvait s’y attendre, que les avantages du plomb l’emporteraient sur ses effets nocifs. De même, on nous dit que le rayonnement de l’antenne d’un téléphone portable est trop diffus pour nous affecter, même dans le cas de la version 5G plus puissante.

Au fur et à mesure que nous accumulons de plus en plus de produits et de processus qui nuisent à la santé et au bien-être de la population, nous allons certainement finir par porter atteinte à la santé de chaque être humain sur la planète. Et nous le ferons au nom du plus grand bien pour le plus grand nombre. Il est difficile de voir comment ce type de pensée a fait autre chose que de causer d’immenses torts aux êtres humains en recherchant des avantages douteux, avantages qui consistent presque toujours à gagner plus d’argent et non à protéger et enrichir la vie humaine.

- Tiré de “The greatest good for the greatest number: A doctrine of acceptable losses” à https://www.resilience.org/stories/2019-01-20/the-greatest-good-for-the-greatest-number-a-doctrine-of-acceptable-losses/

Traduction : Jean Hudon - www.cqlpe.ca

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Site de la campagne québécoise Stoppons la 5G – Vivons sans danG