L'auteur est coordonnateur de l'Association des manufacturiers de bâtiments modulaires du Québec 
www.ambmq.ca

 

Nous parlons de plus en plus de l’industrialisation de la construction. C’est qu’il y a une tendance lourde à produire en usine des modules ou des panneaux qui seront ensuite assemblés sur le site choisi. Si auparavant l’industrie du bâtiment usiné était concentrée presque exclusivement dans l’unifamilial et le chalet, plusieurs entreprises ont développé depuis une dizaine d’années de nouveaux marchés que sont le multilogement, le commercial, l’industriel et l’institutionnel. Il se trouve que des fabricants de bâtiments qui ne font même pas de maison unifamiliale. Ainsi, l’association qui les représentait, la Société québécoise des manufacturiers d’habitation (SQMH), a changé de nom afin de s’ajuster à la réalité pour devenir l’Association des manufacturiers de bâtiments modulaires du Québec (AMBMQ).

La plupart des nouveaux agrandissements d’écoles, que ce soit l’ajout de 10, 20 ou 30 classes, sont maintenant développés en usine. Ainsi, dès la fin des classes en juin les modules sont livrés et installés avant même les vacances de la construction. Au retour des vacances on termine les finitions extérieures et intérieures pour être prêts à accueillir les professeurs et les étudiants dès la rentrée. Ces classes sont même souvent conçues pour éventuellement être déménagées dans un autre secteur afin de suivre la croissance démographique et la demande de nouvelles écoles ailleurs.

Sur le plan écologique, le bâtiment modulaire à ossature légère en bois se distingue à plusieurs égards. Si dans la construction résidentielle, le bois est très largement utilisé, il en est totalement autrement pour les secteurs commercial, industriel et institutionnel où l’usage de l’acier-béton est la norme. Le modulaire à ossature légère en bois prend et prendra de plus en plus de place dans ces secteurs. Les études sont claires, le bois est nettement idéal sur le plan écologique. En 2020, le gouvernement du Québec a adopté une politique d’intégration du bois en construction visant à accroitre la présence du bois dans le bâti. Elle s’applique aux infrastructures publiques, parapubliques et privées du secteur de la construction résidentielle et non résidentielle, les ministères et agences gouvernementales ayant un devoir « d’exemplarité ».

Par ailleurs, dans le contexte d’une économie circulaire, en fin de vie, les matériaux constituant un bâtiment devraient être récupérés et réutilisés. Ainsi, le bois qui a séquestré du CO2 durant la vie du bâtiment pourra continuer à le séquestrer pour un autre cycle.

Bâtir en usine permet aussi une optimisation de l’usage des matériaux, donc on génère peu de pertes. De même, l’empreinte écologique laissée sur le site d’érection des bâtiments usinés est minime comparativement à la construction sur place, car il n’y a quasiment pas de rebuts. Et comme les matériaux ne sont pas exposés aux éléments, il y a moins de risque qu’ils soient abîmés, moisis ou volés.

Bâtir en usine réduit aussi l’impact global du transport. Livrer des quantités importantes de composantes de bâtiments à une usine puis en panneaux ou modules sur les chantiers réduit considérablement le COdégagé pour l’ensemble de la chaîne de production par rapport à la construction classique où tout est livré en plus petites quantités.

La plupart des fabricants de bâtiments usinés, du moins ceux qui sont membres de l’AMBMQ, respectent et même dépassent les exigences minimales du Code de construction du Québec (CCQ), notamment en matière d’isolation, ce qui fait que leurs bâtiments consomment moins d’énergie et sont plus solides que des bâtiments ordinaires.

On parle aussi d’une meilleure qualité de construction. Outre les contrôles internes, toutes nos usines doivent être inspectées par des firmes qualifiées et autorisées à certifier leur conformité à la norme CAN/CSA-A277, « Mode opératoire visant la certification en usine des bâtiments », une exigence du CCQ depuis le 1er juin 2015.

Autre point important avec l’usiné : le respect des prix et des échéanciers.

Dans un autre ordre d’idée, comme le temps d’érection sur chantier d’un bâtiment usiné est beaucoup moindre, on parle, selon les gabarits, de plusieurs semaines à plusieurs mois gagnés, ce qui réduit d’autant la pollution visuelle et sonore ainsi que la circulation de camions dans un voisinage durant la même période. Et on sait que les sites de construction sont susceptibles d’attirer la vermine, alors vaut mieux fermer les bâtiments le plus rapidement possible. Pour un promoteur immobilier qui a un projet de 48, 60 voire 80 portes, la construction industrialisée lui permettra de raccourcir de plusieurs mois la durée du projet, ce qui aura un impact majeur sur les coûts (financement, assurances, gardiennage, etc.) et permet de devancer d’autant l’entrée de revenus de vente ou de location.

Dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre, il devient encore plus évident qu’il faille accroître la productivité dans le secteur de la construction. Les fabricants de bâtiments, comme les autres manufacturiers, sont engagés dans le courant de l’automatisation et de l’implantation du numérique. Comme la production de masse génère des économies d’échelle, les coûts auront tendance à diminuer sinon à se stabiliser dans un contexte économique inflationniste.

Enfin, la construction en usine a aussi un impact positif sur la santé et sécurité au travail, en réduisant les risques de blessures et d’accidents. Les ouvriers et ouvrières travaillent dans un environnement contrôlé avec des postes de travail ergonomiques, des chariots élévateurs, des ponts roulants et des convoyeurs. Cela permet d’ouvrir l’usine à la gent féminine. Qu’il y ait un orage, une tempête ou autre dérangement climatique, le travail en usine se poursuit sans souci.

On parle de pénurie de logement social, abordable ou autre. L’usiné fait nettement partie de la solution, ici au Québec et ailleurs. Et c’est exportable.

L’usiné, c’est l’avenir, comme en témoigne le site Web de la Société canadienne d'hypothèques et de logement (SCHL).