Photo: http://www.theinklingsoflife.com/
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Quelque 1 800 études scientifiques publiées dans le monde entier au cours des cinq dernières années suggèrent que notre surexposition aux champs électromagnétiques (CEM) de faible intensité présente une grave menace pour la santé publique, selon un nouveau rapport signé par 29 experts indépendants qui réclament de toute urgence l’établissement de normes d’exposition basées sur la biologie.

Autisme, hyperactivité, problèmes d’apprentissage, de mémoire et de comportement, cancers du sang, du sein et du cerveau, infertilité, fausses couches, insomnie, allergies, maladies inflammatoires, électrosensibilité, maladies neurologiques et cardiaques, etc. : les jeunes enfants, les futurs parents et les femmes enceintes qui sont exposés quotidiennement aux radiofréquences (RF), comme les micro-ondes émises par les téléphones cellulaires et autres appareils sans fil, sont particulièrement à risque de contracter ces problèmes de santé, selon le nouveau rapport BioInitiative 2012.

Mise à jour du célèbre rapport BioInitiative publié en 2007, ce document de 650 pages recense 1 800 études publiées depuis 2007 et qui s’ajoutent aux milliers d’autres études publiées depuis 40 ans sur les effets biologiques et sanitaires des CEM de hautes (kilohertz, mégahertz et gigahertz de nos appareils sans fil) et basses fréquences (60 hertz de l’électricité domestique).

Les dernières études démontrent que les effets biologiques des CEM se manifestent à des niveaux d’exposition qui sont des centaines de fois plus faibles qu’on le croyait en 2007. Ceci alors que l’exposition du public aux CEM de RF augmente de façon exponentielle (le nombre de cellulaires en usage dans le monde est passé de 2 milliards en 2002 à 6 milliards en 2012).

Le rapport BioInitiative 2012 recommande donc l’adoption urgente de limites d’exposition fondées sur les effets biologiques des CEM. Il recommande aussi l’application de mesures de précaution comme l’interdiction des branchements internet sans fil (Wi-Fi) dans les écoles (le gouvernement allemand privilégie d'ailleurs les connexions câblées) et la réduction des CEM présents dans les incubateurs.

Ce rapport a été rédigé par 29 experts indépendants, dont 21 titulaires de doctorats parmi lesquels on compte 10 médecins, et qui rappellent que les organes comme le cœur et le cerveau sont réglés par des signaux bioélectriques. Parmi ces auteurs : l’ingénieur en électricité Yury Grigoriev, président du Comité national russe sur la protection de la radiation non ionisante, le physicien Paul Héroux, professeur de santé au travail au Département de médecine de l’Université McGill, et David Gee, conseiller scientifique principal, Politiques et nouveaux enjeux, à l’Agence européenne pour l’environnement.

En 2011, le Centre international de recherche sur le cancer a classé les RF émises par les antennes et les appareils sans fil que nous côtoyons quotidiennement comme « peut-être cancérogènes pour l’homme ». Ceci d’abord parce que le risque de gliome (tumeur maligne du cerveau) double chez les adultes qui ont utilisé un téléphone sans fil ou cellulaire pendant au moins 1 640 heures réparties sur 10 ans. Une étude de l’oncologue suédois Lennart Hardell a par ailleurs démontré que les enfants et les adolescents qui utilisent couramment un cellulaire quintuplent leur risque de contracter un gliome dans la vingtaine. « Il y a une tendance constante d’augmentation du risque de gliome et de neurinome de l'acoustique avec l'utilisation des téléphones mobiles et sans fil, explique le Dr Hardell, coauteur du chapitre de BioInitiative sur ces tumeurs cérébrales. Les données épidémiologiques montrent que les radiofréquences devraient être classées comme cancérogènes pour l'homme. »

Le rapport BioInitiative 2012 souligne également que les limites d’exposition aux RF en vigueur dans la plupart des pays ne sont pas établies pour protéger la santé publique. Elles ne tiennent compte que des risques thermiques pour les tissus, mais sont jusqu’à des milliers de fois plus élevées que les niveaux d’exposition provoquant d’autres effets biologiques sérieux.

Par exemple, une douzaine de nouvelles études ont associé le rayonnement des téléphones cellulaires à des dommages aux spermatozoïdes. « Même un téléphone portable tenu dans la poche ou à la ceinture peut nuire à l'ADN des spermatozoïdes, provoquant des déformations et altérant la fertilité chez les hommes. Les ordinateurs portables avec connexion Internet sans fil peuvent endommager l'ADN dans le sperme », peut-on lire dans le rapport.

Plusieurs problèmes de comportement et physiologiques manifestes chez les autistes sont très similaires aux effets biologiques et sanitaires de l’exposition aux CEM : carences en antioxydants, calcium intracellulaire élevé, problèmes immunitaires, digestifs, etc. « Pendant que nous enquêtons agressivement sur les liens entre les troubles associés à l'autisme et les technologies sans fil, il faut minimiser l'exposition aux CEM des appareils sans fil pour les personnes souffrant de troubles associés à l'autisme, les enfants de tous les âges, les futurs parents et les femmes enceintes », explique la Dre Martha Herbert, co-auteure de ce chapitre et professeure adjointe de neurologie pédiatrique à l’Université Harvard.

Par ailleurs, le psychologue Henry Lai de l'Université de l'État de Washington signe le chapitre soulignant que des études réalisées avec des animaux et des humains révèlent que certains appareils sans fil, comme les téléphones et les ordinateurs portables avec internet sans fil (Wi-Fi), lorsqu’ils sont utilisés par les femmes enceintes, peuvent perturber le développement du cerveau du fœtus et entraîner de l'hyperactivité ainsi que des problèmes d'apprentissage et de comportement.

Selon le Dr David O. Carpenter, ancien doyen fondateur de l’École de santé publique de l’Université d’Albany (New York) et coéditeur du rapport BioInitiative de 2012 : « De nos jours, les preuves que les CEM représentent un risque pour la santé de milliards de personnes à travers le monde sont beaucoup plus nombreuses. Le statu quo n'est pas acceptable à la lumière des éléments de preuve de préjudice. »

Le rapport BioInitiative 2012 porte sur les effets des CEM émis par les lignes et câbles électriques, les appareils portables et les technologies sans fil (téléphones cellulaires et sans fil, tours/antennes pour cellulaires, compteurs « intelligents », Wi-Fi, routeurs sans fil, interphones de surveillance pour bébés, etc.). Outre le cancer, parmi les effets sanitaires des CEM soulevés dans les dernières études : la génotoxicité, les dommages à l’ADN, la perte de capacité de réparation des cellules souches, la réduction de la mélatonine et autres antioxydants protégeant du cancer et autres maladies, et les problèmes de développement du fœtus, notamment sur les plans osseux et cérébral.

Sa coéditrice Cindy Sage, qui a cosigné ou a été citée dans des centaines de publications scientifiques révisées par des pairs, réfute les allégations des critiques sur son prétendu conflit d'intérêts : « Je ne gagne pas ma vie avec les CEM, dit-elle. Depuis des décennies, notre entreprise Sage Associates a plutôt financé la recherche et des publications sur les CEM sur le dos de notre pratique de consultation environnementale. »

Pour en savoir davantage : www.bioinitiative.org
Lettre ouverte envoyée au Congrès par l'Académie américaine de pédiatrie qui plaide pour des normes d'exposition plus sévères afin de protéger les enfants des émissions des téléphones cellulaires : http://www.hese-project.org/uk_forum/index.php?mode=thread&id=513