Traduction de :Votre téléphone portable peut-il causer le cancer?
Les scientifiques trouvent un lien définitif dans l’étude des rats.
PAR JOHN MURAWSKI
jmurawski@newsobserver.com
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Research Triangle Park, Caroline du Nord, 28 mars 2018

Les ondes radioélectriques des téléphones portables peuvent être liées de manière décisive au cancer chez les rats, selon un panel scientifique national américain réuni mercredi à Research Triangle Park (RTP). La conclusion des scientifiques établit le lien le plus clair avec le risque de cancer présenté pour les humains par le téléphone portable dans une des plus importantes études américaines réalisées à ce jour.

Les scientifiques ont fait leur annonce à la fin d’une réunion de trois jours pour examiner une expérience de 25 millions de dollars menée sur des rongeurs par le National Toxicology Program (Programme national de toxicologie) au RTP pour la Food and Drug Administration (FDA) des États-Unis. L’ébauche de l’étude, publiée début février, avait établi un lien faible dans certains cas, mais le groupe consultatif scientifique a affirmé mercredi que les données étaient plus convaincantes et indiquaient un risque plus élevé que ce qui avait été initialement reconnu.

La décision de mercredi devrait changer le débat sur la sécurité des téléphones portables, et les militants de la santé publique prédisent que les résultats vont pousser les agences fédérales à lancer des avertissements de sécurité et à renforcer les normes de sécurité (sur l’usage) de cet appareil électronique omniprésent.

« Cela devrait très probablement conduire à une réduction des limites d’exposition », a déclaré Ronald Melnick, le scientifique du National Toxicology Program qui a conçu l’étude avant sa retraite il y a neuf ans. « Cela compte beaucoup parce que les agences qui recevront ces données prendront des décisions de santé publique basées sur ces informations », a-t-il dit.

Melnick a indiqué que les risques pour la santé reconnus ce mercredi devraient également contraindre les responsables publics et les responsables des télécommunications « à ne pas promouvoir l’utilisation de certains de ces dispositifs émetteurs de radiofréquences pour les enfants ».

Le projet de rapport original a été jugé peu concluant par la FDA et l’American Cancer Society le mois dernier, et les militants s’attendaient à ce que le groupe scientifique approuve ces conclusions lors de la réunion de mercredi.

Avant que les scientifiques ne votent, Kevin Mottus, le directeur de la sensibilisation de la California Brain Tumor Association [l’association californienne des victimes de tumeurs cérébrales qui « milite pour que la prévention soit le traitement et dénonce les dangers environnementaux mettant en danger la santé publique »], a demandé à l’ensemble du panel de se récuser faute de qualifications pour évaluer les données sur les radiofréquences. Mottus a déclaré plus tard que les téléphones cellulaires sont comparables à l’amiante et au tabac et devraient porter des étiquettes d’avertissement de santé.

Mais au fur et à mesure de la discussion, les scientifiques ont commencé à proposer des motions pour réviser les résultats et dire qu’une exposition prolongée aux radiofréquences peut être clairement liée au cancer du tissu cardiaque chez les rats mâles. L’étude concluait précédemment qu’il y avait un lien mais pas de preuve claire.

Les cancers du tissu cardiaque étaient particulièrement significatifs parce qu’ils constituent une forme rare de cancer qui survient encore plus rarement chez le rat et qui ne peut être expliquée comme une maladie aléatoire.

Les panélistes ont également voté pour l’affirmation que l’étude montre un lien entre le rayonnement du téléphone cellulaire et le cancer du cerveau chez les rats. L’ébauche de l’étude disait que le lien était équivoque, une désignation scientifique indiquant qu’il n’était pas concluant et peut-être sans conséquence.

En plus de montrer une augmentation des cancers chez les rats, l’étude a également montré que les rats nouveau-nés pesaient moins et souffraient de taux de mortalité plus élevés lorsqu’ils vivaient dans une chambre d'exposition aux radiofréquences.

Et après?
Le directeur du bureau de la science et de l’ingénierie de la FDA, Edward Margerrison, a assisté à la réunion et a mis en garde contre la formation de conclusions hâtives basées sur les votes de mercredi. « Nous adoptons une approche responsable », a-t-il déclaré. « Nous ne prendrons pas de décision impulsive sur quoi que ce soit. »

La FDA doit traduire les résultats obtenus chez les rongeurs par rapport aux risques présentés pour la santé humaine, et la Federal Communications Commission décidera si les conclusions de la FDA sont suffisamment sérieuses pour justifier l’établissement de normes d’émissions plus sévères pour les téléphones portables américains.

Margerrison a souligné que l’expérience sur les rats a exposé les animaux à des niveaux de radiofréquences plus élevés que ce que reçoit typiquement un utilisateur de téléphone cellulaire. Mais les militants présents à la réunion ont prétendu que l’exposition sur deux ans – vécue par les rats – était comparable à une exposition à vie pour un être humain. 

La décision du groupe scientifique est seulement consultative et devra être adoptée par la FDA, mais le scientifique John Bucher a dit qu’il est inhabituel que les recommandations d’un groupe consultatif soient rejetées. Bucher, du NTP, était le scientifique principal de l’étude, commandée par la FDA en 1999 et réalisée dans des chambres souterraines, où 3000 rongeurs ont été bombardés de radiofréquences neuf heures par jour pendant deux ans.

L’industrie des télécommunications a longtemps insisté sur le fait que ses produits sont sûrs pour une utilisation quotidienne. Jason Johnson, porte-parole de la CTIA (Cellular Telecommunications Industry Association), qui regroupe les industriels des télécommunications, a déclaré que la décision de mercredi devra être évaluée, notant que l’avis du panel ne représentait pas le dernier mot sur cette question litigieuse. « La communauté scientifique considérera les projets de rapports du NTP dans le contexte des nombreuses autres études scientifiques menées sur plusieurs décennies », a-t-il annoncé par courrier électronique. « La Federal Communications Commission, la Food and Drug Administration, l’Organisation mondiale de la santé, l’American Cancer Society et de nombreuses autres organisations internationales et américaines ont maintenu leur conclusion de longue date selon laquelle les preuves scientifiques ne démontrent aucun risque pour la santé. »

 

Comment vous protéger

Les militants de la santé publique ont rappelé que durant la poursuite de cette guerre des études contradictoires et des opinions d’experts, le public peut prendre des mesures concrètes pour se protéger de l’exposition aux radiations des téléphones cellulaires. Ils recommandent d’utiliser des écouteurs ou des casques d’écoute filés (pas sans fil). Ils recommandent aussi de garder le téléphone loin du corps, de le porter dans un sac à dos ou un sac à main et d’utiliser un haut-parleur pour converser, et de ne pas porter de téléphone cellulaire dans ses poches parce que les organes reproducteurs mâles sont particulièrement sensibles aux ondes de radiofréquences.

L’épidémiologiste et auteure Devra Davis, présidente de l’Environmental Health Trust et professeure de médecine invitée à l’Université hébraïque d’Israël, a affirmé que même si les résultats de laboratoire ne sont pas concluants pour un scientifique, ils signalent pourtant que les humains sont involontairement menacés par leurs propres inventions. « Nous sommes au milieu d’une vaste expérimentation sur nous-mêmes », a-t-elle dit.

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