Le maire de Bromont a accueilli favorablement une proposition de protocole d'implantation des systèmes d'antennes cellulaires déposée lundi par un comité de citoyens dirigé par un ancien réalisateur de l'émission scientifique Découverte, de Radio-Canada (vidéo ci-dessous).

« Je pense qu'on doit se doter d'un protocole et on va amener ça à la commission », a déclaré le maire Louis Villeneuve.  Ce « ne sera pas sur une tablette », a-t-il ajouté en précisant que la municipalité doit se protéger juridiquement, dans ce dossier qui relève du gouvernement fédéral.

Depuis 18 mois, le groupe Vigilance Bromont, dont fait partie le réalisateur à la retraite Pascal Gélinas, s'est opposé avec succès à l'érection d'une quatrième tour cellulaire par Vidéotron sur le territoire bromontois. Cela aurait porté à dix le nombre de tours sur ce territoire de 116 km2 comptant 11 800 habitants. Vigilance Bromont veut notamment protéger les paysages de la ville, de même que la valeur économique et patrimoniale des propriétés ainsi que la santé publique. 

« C'est pas normal que les compagnies de télécommunication arrivent avec le rouleau compresseur puis installent des antennes partout sans qu'une municipalité ne puisse se prononcer », a déploré M. Gélinas. Il a ajouté que déjà une cinquantaine de petites antennes cellulaires ont été installées dans un quartier de Bromont sans que la municipalité n'ait pu se prononcer, et sans que les citoyens n'en soient informés. Les travaux sans préavis sont courants sur les structures existantes, explique Sharon Noble de l'organisme Citizens for Safer Tech. « Vers 2003, Industrie Canada a rédigé la politique CPC 2-0-03 qui autorise cette pratique, en précisant que seules les antennes installées sur de nouvelles structures, comme une nouvelle tour, doivent faire l'objet d'une demande et d'un avis à la communauté. Aucun avis n'est requis pour l'installation d'antennes sur une structure existante telle qu'une tour, une église, un bâtiment... »

Rebaptisé Innovation, Sciences et Développement économique Canada, ce ministère régit le domaine des télécommunications au pays. En 2014, il publiait un Guide destiné aux autorités responsables du sol (ARUS) pour la rédaction des protocoles visant les emplacements de systèmes d'antennes. « Les protocoles permettent aux ARUS de faire valoir leurs connaissances et compétences locales touchant les particularités des emplacements, notamment en ce qui concerne les préoccupations environnementales et culturelles, ainsi que la compatibilité dans l’utilisation du sol », précise le document.

Enjeu sanitaire

Vigilance Bromont propose que les tours cellulaires soient implantées à au moins 500 mètres des habitations, tel que le précise un projet de loi bipartisan du New Hampshire sur les effets sanitaires de la technologie cellulaire de cinquième génération (5G). Santé Canada affirme que le rayonnement de radiofréquences/micro-ondes pulsées émis par les antennes relais de téléphonie cellulaire respecte les recommandations de son Code de sécurité 6. Celui-ci ne concerne toutefois que les expositions à court terme et ne vise qu'à éviter l'échauffement des tissus humains, le seul risque sanitaire avéré sur lequel il y a consensus scientifique.

Or, en 2022, une analyse de 38 études révisées par des pairs a indiqué que les trois-quarts concluent à un accroissement des cancers, de la maladie des micro-ondes ou à d'autres effets non thermiques du rayonnement de radiofréquences chez les gens vivant à proximité d'antennes cellulaires. Par ailleurs, six récentes études de cas réalisées par l'oncologue et épidémiologiste suédois Lennart Hardell ont déjà fait état de problèmes de santé chez des gens vivant tout près de micro-antennes 5G installées sur ou devant leur immeuble. Une famille était notamment incommodée par une densité de 1 403 microwatts par mètre carré (μW/m2) mesurée sur l'oreiller d'un lit alors que la nuit, on ne devrait pas dépasser 1 μW/m2 (ou 0,2 volts par mètre, à l'instar du Conseil d'Europe) d'exposition pour les fréquences du Wi-Fi (2,4/5,6 gigahertz et pulsations à 10 hertz), ou 10 μW/m2 pour les fréquences de la téléphonie 4G (700 mégahertz à 2,6 gigahertz), indiquent les Lignes directrices EUROPAEM 2016 pour la prévention, le diagnostic et le traitement des problèmes de santé et des maladies liés aux champs électromagnétiques, publiées par l'Académie européenne de médecine environnementale.

Pour éviter les effets thermiques des micro-ondes, le CS6 de Santé Canada permet jusqu'à 4,5 millions μW/md'exposition pendant 6 minutes, du moins pour la fréquence cellulaire 2G, de 1 800 mégahertz.

Bien que le rayonnement des antennes mesuré dans les habitations soit généralement bien plus faible que celui provenant de sources internes (routeurs Wi-Fi, téléphones sans fil et cellulaires, etc.), la durée d'exposition inquiète les scientifiques car les antennes ne peuvent être éteintes la nuit comme les appareils domestiques.  « Le signal des antennes est typiquement 1 000 fois moins fort, mais constant, explique-t-il. C'est le sujet de l'étude de l'Institut Ramazzini » qui reproduisait le rayonnement d'antennes et qui a reproduit les mêmes tumeurs nerveuses autour du coeur de rats exposés que celles causées par les chercheurs du programme américain de toxicologie qui exposait les rongeurs aux ondes d'un cellulaire. Ces deux études ont incité plusieurs experts indépendants à dire que les ondes cellulaires sont « probablement cancérogènes » pour l'humain.

De plus en plus de familles se plaignent d'insomnie et autres symptômes depuis l'installation de micro-antennes 4G et 5G devant ou sur leurs habitations.
Source : http://windheimemfsolutions.com

 

Pascal Gélinas soulignait également que les propriétés situées à proximité d'une tour cellulaire subissent une dévaluation qui peut atteindre 20 %, parfois plus. M. Gélinas rappelait aussi à son conseil municipal qu'aucune compagnie d'assurance n'accepte d'assurer le risque sanitaire potentiel présenté par le rayonnement des technologies de communications sans-fil, le réassureur Swiss Re l'ayant classé dans la catégorie de risques la plus élevée.

« Suite au récent projet de Vidéotron d'ériger sur le chemin Compton une 10e tour de télécommunications, et considérant le fait que Bell a déjà installé une cinquantaine d'antennes micro-cellulaires sur son territoire, il est clair que la municipalité de Bromont a urgemment besoin d'un protocole d'implantation de systèmes d'antennes, a expliqué M. Gélinas. Voilà pourquoi nous vous présentons aujourd'hui, dans le texte en annexe intitulé Un protocole pour Bromont, une proposition regroupant les principaux éléments que ce protocole pourrait contenir, permettant à la municipalité de mieux protéger son environnement, son patrimoine et la santé de ses citoyens. »

Plus de détails dans le quotidien La Voix de l'Est.

 

Exemples d'effets documentés de l'exposition chronique aux radiofréquences selon la densité maximale mesurée

Source : https://bioinitiative.org/rf-color-charts/

0,006 – 0,01 μW/cm2 ou 60 à 100 μW/m2
L’exposition chronique des humains au rayonnement d’antennes cellulaires causait une hausse des hormones de stress, dont l’adrénaline et la noradrénaline, une chute de la dopamine. L’état chronique de stress dans les cellules était visible même 1,5 an après d’exposition et une relation dose-réponse était évidente. (Buchner, 2011)
0,01 à 0,11 μW/cm2 ou 100 à 1 100 μW/m2
Rayonnement d’antennes causant de la fatigue, des maux de tête et des problèmes de sommeil. (Navarro, 2013)
1 μW/cm2 ou 10 000 μW/m2
Fuite pathologique de la barrière hématoencéphalique (Persson, 1997)
Effets immunitaires significatifs chez les souris (Fesenko, 1999)
1,3 à 5,7 μW/cm2 ou 13 000 à 57 000 μW/m2
Risque dédoublé de leucémie chez les adultes vivant à moins de 2 km d'antennes radio et télé (Dolk, 1997)
1,5 μW/cm2 ou 15 000 μW/m2
Mémoire réduite chez les rats (Nittby, 2007)
4 μW/cm2 ou 40 000 μW/m2
Changements dans l’hippocampe régissant la mémoire et l’apprentissage (Tattersall, 2001)

Voici la présentation faite par M. Gélinas devant les élus de Bromont.

Cliquer sur Show more pour lire la transcription de son allocution.