De nombreuses actions collectives ont été intentés depuis qu'une enquête indépendante du Chicago Tribune avait révélé que plusieurs modèles de téléphones cellulaires exposait leurs usagers à des niveaux de rayonnement de radiofréquences dépassant les limites fédérales. 

Voir aussi : Liste des téléphones portables retirés ou mis à jour pour tromperie et mise en danger des utilisateurs

Dans un jugement rendu le 26 août 2022, des juges de la Cour d'appel du nord de la Californie (9e district) affirment que la réglementation de la Federal Communications Commission (FCC) prévaut sur le procès intenté à Apple au sujet du rayonnement de radiofréquences (RF) émis par ses téléphones cellulaires. 

Le tribunal de district a rejeté l'action collective affirmant qu'en usages réels  par exemple, portés dans une poche les iPhones exposent leurs utilisateurs à des niveaux de rayonnements outrepassant les limites réglementaires.

«  Les plaignants demandent qu’un jury californien constate que les téléphones que la FCC affirme être sans danger sont en fait dangereux, et qu’elle reconnaisse non pertinentes les divulgations que la FCC estime suffisantes » a déclaré Joseph R. Palmore, l'avocat représentant Apple. « Et ils inviteraient les jurys des 50 États à se prononcer sur ces mêmes questions. »

En conformité avec les inquiétudes du géant des technologies, les juges ont déclaré que les réglementations fédérales fixant les niveaux de rayonnement prévalaient sur la loi de l’État selon laquelle l’affaire contre le géant californien pouvait être portée au tribunal :

« Nous considérons…  que les réglementations de la FCC sur les rayonnements (radiofréquences) des téléphones portables, promulguées en vertu de la loi de 1934, prévalent sur les réclamations des plaignants telles qu’elles nous sont présentées en appel, celles-ci se référant aux droits des États. »

Un changement de stratégie juridique perdant pour les plaignants

Par ailleurs, les plaignants n’ont pas poursuivi en appel leur plainte selon laquelle les iPhone émettent des rayonnements RF à des niveaux supérieurs au maximum autorisé par la réglementation de la FCC. Ce changement de stratégie juridique – pour le moins incompréhensible – a eu de graves conséquences, comme le relève le jugement :

« La concession des plaignants selon laquelle l’iPhone de Apple est conforme aux niveaux d’émission prescrits par la FCC est fatal à leur appel ».

Alert Phonegate a sollicité Me Elizabeth Fegan, du cabinet Fegan Scottpour connaître les suites possibles à cette action contre Apple. Voici sa réponse :

« Cette décision crée un « circuit split » (conflit entre les tribunaux au niveau de l’appel). En conséquence, nous étudions nos options – qui comprennent le dépôt d’une pétition de certiorari (demande d’autorisation d’appel) auprès de la Cour suprême des États-Unis. La pétition doit être déposée dans les 90 jours suivant la date de l’avis du 9e district (sauf si une prolongation est accordée). »

Les soi-disant « limites de sécurité » de la FCC sont une imposture

Nous avons aussi demandé au Dr Joel Moskowitz, de l’université californienne de Berkeley – en tant que spécialiste de cet enjeu sanitaire – de nous donner son avis sur ce jugement :

« Les soi-disant « limites de sécurité » de la FCC pour les émissions de rayonnements des téléphones portables sont une imposture. Ces limites ont été établies il y a plus d’un quart de siècle sur la base d’un ensemble d’hypothèses dont des centaines d’études évaluées par des pairs ont démontré qu’elles étaient bien trop laxistes pour prévenir les effets biologiques et sanitaires indésirables. De plus, la FCC a adopté des procédures qui permettent de tester les téléphones cellulaires jusqu’à 25 millimètres du corps ; ainsi, la plupart des téléphones mobiles dépassent la faible « limite de sécurité  » de la FCC lorsqu’ils sont testés de la manière dont les gens utilisent réellement leur téléphone près de leur corps. En raison de la négligence de la FCC en matière de protection de la santé publique et environnementale, le Congrès devrait retirer à la FCC le pouvoir de réglementer les émissions de rayonnement sans fil et autoriser les agences ayant une expertise en matière de santé à assumer cette responsabilité. »

De son côté, Theodora Scarato, directrice exécutive de l’ONG Environmental Health Trust (EHT) et membre du conseil d’administration d’Alerte Phonegate, tient à rappeler :

« La Cour d’appel des États-Unis pour le circuit D.C. a statué en août 2021 dans notre procès EHT et al. v. the FCC que la FCC avait « échoué » à fournir une explication raisonnée pour sa détermination que les limites d’exposition humaine aux rayonnements des téléphones cellulaires de 1996 de la FCC protègent adéquatement contre tous les effets nocifs de l’exposition. En raison de notre affaire, la FCC a été mandatée par la Cour pour fournir une explication de sa décision de conserver ses procédures de test pour déterminer si les téléphones cellulaires sont conformes à ses directives. La FCC a également reçu l’ordre de la Cour d’aborder les impacts des rayonnements des téléphones cellulaires sur les enfants ainsi que les implications pour la santé d’une exposition à long terme aux radiations RF. La FCC n’a toujours pas répondu. Les soi-disant « limites de sécurité » en matière de rayonnement des téléphones portables en vigueur aux États-Unis sont dépassées et ne s’appliquent pas aux technologies modernes. »

Une absence totale de couverture médiatique du jugement aux USA

Pour le Dr Marc Arazi, qui a fait connaître le scandale du Phonegate aux États-Unis (et qui vient de publier la version anglaise de son livre « Phonegate ») :

« La première chose qui me choque, c’est l’absence totale de couverture médiatique de ce jugement, tant aux USA que dans le reste du monde. « Surtout ne pas parler de l’affaire », c’est le mot d’ordre qui semble la règle pour les industriels de la téléphonie mobile. Cette absence de réaction du géant Apple – et ce, alors qu’il se voit donner gain de cause – montre à quel point le sujet dérange… et tout particulièrement lors du lancement de l’iPhone 14. Ensuite, ce combat sera long, mais nous savons maintenant que la vérité scientifique est en route et que, un jour prochain, Apple et tous les industriels du secteur devront répondre d’avoir surexposé et trompé sciemment des milliards d’utilisateurs de téléphones portables, mettant ainsi en danger la santé de leurs clients. »

Historique des plaintes contre les iPhone d’Apple et les Galaxy de Samsung

Suite à la publication de l’enquête d'un journaliste émérite du quotidien Chicago Tribune révélant les résultats de contrôles de téléphones mobiles populaires dans un laboratoire accrédité par la FCC, une première action collective contre Apple et Samsung a été déposée le 23 août 2019 devant la U.S. District Court for the Northern District of California à San Jose, comprenant 11 plaignants qui allèguent que certains modèles Apple et Samsung émettent plus d’ondes qu’il n’est permis par la réglementation (Affaire no 5:19-cv-05322).

 

Les plaignants rapportent que les téléphones mobiles dépassent la limite réglementaire maximale DAS (1,6 W/kg aux États-Unis). Toute personne ayant utilisé certains modèles iPhone et Galaxy dépassant les limites fédérales de sécurité courent un risque accru de problèmes de santé.

Les plaignants allèguent également qu'Apple et Samsung commercialisent leurs téléphones mobiles en partant du principe que les appareils peuvent toujours être près du corps, par exemple dans une poche ou tenus en main. Ils rapportent également que les anciens modèles de iPhone incluaient la recommandation faite aux utilisateurs d’écarter leur téléphone à au moins 10 mm de leur corps. Toutefois, les modèles plus récents n’ont pas donné de tels conseils aux consommateurs. Le matériel de marketing de Samsung pour ses appareils laisse entendre que garder ou porter le téléphone près du corps est sans danger.

Le 10 septembre 2019, une nouvelle action collective contre Apple et Samsung a été déposée par Andrus Anderson LLP devant la U.S. District Court for the Northern District of California à San Francisco, représentant 16 plaignants (affaire n° 3:19-cv-05707).