L'électrohypersensibilité peut être déclenchée par des fréquences électromagnétiques différentes d'un individu à l'autre.
L'électrohypersensibilité peut être déclenchée par des fréquences électromagnétiques différentes d'un individu à l'autre.

Voici ce que la chercheure en électrosmog ontarienne Magda Havas vient d'envoyer à l'éditeur en chef de La Presse André Pratte après avoir lu l'article Électrosensibilité : la science en terrain délicat :

Je crois que ceux qui ont mené certaines des études et ceux qui les ont passés en revue ont commis une série d’hypothèses erronées.

Une personne qui est « sensible » à un agent n’est pas toujours capable de « détecter la présence de cet agent ». Ainsi, les études qui ont demandé aux participants s’ils étaient ou non exposés à des champs électromagnétiques (CEM) n’ont pas été testé pour leur « électrosensibilité » (une réponse physiologique à un facteur de stress), mais plutôt leur capacité de « sentir la présence d’un facteur de stress ». Ces deux analyses ne sont pas la même chose.

Par exemple, les gens réagissent différemment aux rayonnements ultraviolets. Certains brûlent rapidement tandis que d’autres sont capables de tolérer des heures d’exposition sans brûler. Nous ne pouvons pas détecter si oui ou non nous sommes exposés aux rayons UV et nous sous-estimons souvent l’exposition les jours nuageux. C’est pourquoi nous recevons des rapports météorologiques nous donnant un indice UV de sorte que nous pouvons réduire notre exposition si nous brûlons facilement.

Moments et fréquences critiques
Une autre idée fausse est que la réponse aux fréquences électromagnétiques se produit instantanément, comme en allumant l'interrupteur d'une lampe. Dans mes recherches, j’ai remarqué que la réponse peut être immédiate ou retardée; de même, la récupération du corps à ce stress peut être immédiate ou retardée, une fois que l’exposition cesse. Ainsi, le moment de l’exposition dans le cadre de ce type d’études est critique. Supposer que tout le monde répond de la même façon aux CEM crée une conception expérimentale déficiente qui produit des résultats insignifiants.

Une troisième supposition erronée estime que les gens répondent à la même fréquence électromagnétique. Le Dr William Rea (Texas) a démontré en 1991 que cela est faux dans une étude à double insu où il a documenté des réponses précises et reproductibles à des fréquences spécifiques et non à toutes les parties du spectre électromagnétique. Sur les 100 personnes qui ont participé à son étude, 16 ont toujours réagi aux mêmes fréquences lorsqu’elles étaient exposées et n’ont jamais réagi à une exposition fictive.

Je tiens également à corriger certaines erreurs factuelles dans votre article.

Effets biologiques incontestables
Nous avons documenté des changements de glycémie chez les diabétiques qui sont électrohypersensibles quand ils sont exposés à leur insu à l’électricité « sale » (fréquences dans les kilohertz).

Dans une étude révisée par des pairs, à double insu, nous avons signalé que certaines personnes subissent une tachycardie (un rythme cardiaque rapide) ou une arythmie (un rythme cardiaque irrégulier) lorsqu'elles sont exposées à des fréquences de 2,4 GHz générées par un téléphone sans fil à des niveaux qui sont moins de 1 % du Code de sécurité 6 des lignes directrices de Santé Canada.

Donc, l’affirmation selon laquelle, « des variables telles que le pouls, la pression sanguine, la température de la peau, la transpiration ou la mémoire ont également été étudiées, sans détecter quoi que ce soit », est inexacte.

La SEULE façon valable pour désigner l’électrosensibilité comme « idiopathique » (sans cause connue) est si elle est utilisée pour déterminer POURQUOI certaines personnes ont développé cette sensibilité tandis que d’autres ne l’ont pas développée. Dans certains cas, la sensibilité est déclenchée par un traumatisme physique au système nerveux (ex. : coup de fouet), un traumatisme électrique (chocs répétitifs ou exposition constante à l’électrosmog), une intoxication chimique (notamment au mercure), des toxines biologiques (maladie de Lyme) ou une déficience du système immunitaire (lupus). Ne sachant pas quelle était la « cause » d’origine signifie qu’il est « idiopathique ».

 Prof. Magda Havas
Prof. Magda Havas

L’électrohypersensibilité est réelle. L’Association médicale autrichienne a recommandé que, pour le moment, en vertu de la Classification internationale des maladies, le syndrome d'intolérance aux champs électromagnétiques soit classé dans la catégorie « exposition à des radiations ».

Un dernier point à considérer est qu'il peut y avoir une composante psychologique à l’électrohypersensibilité. Imaginez réagir à quelque chose que vous ne pouvez pas ressentir par une combinaison de fatigue, de douleurs, d'étourdissements, de nausées et d’insomnie au point que vous ne pouvez plus travailler et ne voulez plus sortir de votre maison. Imaginez aussi que vos amis ne vous croient pas et que votre médecin de famille vous recommande de visiter un psychiatre. C’est la situation que beaucoup de gens avec électrohypersensibilité sévère doivent affronter quotidiennement. Le fait d'ignorer ce qui cause cette maladie ne signifie aucunement qu’elle n’existe pas.

Magda Havas, BSc, PhD
Environmental & Resource Studies
Trent University, Peterborough, ON
www.magdahavas.com