Plus robustes, les vieux frigos peuvent bien fonctionner jusqu'à 40 ans.

Premier d’une série sur les électroménagers

La Rimouskoise Hélène Landry songe à se tourner vers un modèle usagé pour son prochain achat de frigo. « Neuf c’est vraiment trop cher et je me dis pourquoi jeter ce qui est encore utilisable et en bon état », dit-elle.

En effet, avez-vous vraiment besoin d’un frigo à 4 800 $ qui vous suggère ce que vous devriez acheter à l’épicerie? Saviez-vous même que la plupart des nouveaux électroménagers sont dotés de puces-antennes communicantes liées à l’Internet des objets?

Le choix le plus avisé que les consommateurs devraient faire en matière de réfrigérateur, c’est garder leur vieux modèle le plus longtemps possible, selon le cofondateur et directeur de l’organisme Écohabitation, Emmanuel Blain Cosgrove. Il ajoute que les frigos intelligents ne sont absolument pas nécessaires. « On tente de nous convaincre de les adopter en nous disant que ça permet d’éviter le gaspillage alimentaire, mais il y a d’autres moyens pour y arriver, comme de faire l’inventaire régulièrement du contenu de son frigo. On est déjà surdosés d’informations sur notre cellulaire : la dernière chose dont on a besoin c’est d’un avis par texto sur l’état de nos légumes! Et c’est sans parler des risques des ondes pour la cybersécurité et la santé… »

Les vieux frigos des années 70, 80 et 90 duraient 30 ou 40 ans et les nouveaux durent seulement 4 ou 5 ans en raison de l’obsolescence programmée, rapporte M. Blain Cosgrove. Selon les fabricants, la durée de vie d'un frigo neuf serait plutôt de 11 ans, ce qui est tout de même scandaleux, ne trouvez-vous pas?

Écohabitation est un organisme sans but lucratif national qui a pour mission de rendre les résidences plus écologiques et plus vertes à travers ses divers programmes, dont LEED pour les habitations dont il est le mandataire de la certification au Québec. « Nous avons toute une équipe d’ingénieurs qui accompagne les projets, surtout du côté du logement social, explique son fondateur. Chacun a un frigo et il faut qu’on cherche les spécifications et qu’on analyse sa consommation. Je recommande de garder son vieux frigo. On nous dit souvent de changer notre frigo pour un modèle certifié  ENERGY STAR. C’est n’importe quoi. De venir me dire que c’est économique et environnemental d’acheter un frigo neuf ENERGY STAR, c’est totalement faux. Ce ne sont pas des gens de science qui vont dire cela, lance-t-il. 

Des gains énergétiques minimes

« Oui, il est vrai que les nouveaux réfrigérateurs consomment moins d’énergie, mais c’est tout de même assez mineur. N'oublions pas qu’en hiver, une partie de cette consommation supplémentaire permet de chauffer la maison puisque le vieux réfrigérateur dégage de la chaleur. Un vieux frigo qui consomme par exemple 800 kilowattheures (kWh) par année, ça ne coûte pas très cher d’électricité. À 10 cents le kWh, ce qui est le pire taux qu’on peut avoir au Québec, ça coûte entre 60 et 80 $ par année pour faire rouler un vieux frigo. Si on veut économiser en électricité, on achète un frigo ENERGY STAR qui consomme 300 kWh (30 $) par année. C’est possible d’économiser un peu. Un frigo des années 1980 va coûter environ 75 $ par année en électricité et un neuf certifié Energy Star 30 $. Il y a donc une économie d’environ 50 $ par année. Si le frigo coûte 1 000 $, il se paie donc sur 20 ans. » Pas très payant quand il rend l'âme après 4 à 11 ans!

En outre, Emmanuel Blain Cosgrove signale que le fameux gain en électricité a finalement très peu d’impact écologique puisque la production d’hydroélectricité génère très peu d’émissions de gaz à effet de serre. « Ce n’est donc pas une raison environnementale qui motive la décision de changer son vieux frigo. J’ai fait recycler mon vieux frigo des années 80 en inox à l’époque où on obtenait 50 $ pour le faire et je le regrette tellement depuis. Il marchait encore. Il était un peu plus bruyant, mais il faisait le travail, même s’il me coûtait un peu plus cher d’électricité. En plus, l’économie sur mon compte d’électricité n’est pas réelle. En physique, rien ne se perd et rien ne se crée. La plinthe électrique a travaillé pour 50 $ de moins par année en raison de la chaleur que dégageait mon vieux frigo », explique-t-il.

Aller vers des frigos usagés

Le spécialiste encourage les consommateurs qui doivent changer de frigo à faire comme Hélène Landry et se tourner vers des modèles usagés. « Le frigo écologique, c’est un vieux bazou qu’on trouve dans les petites annonces. Plus c’est vieux, plus ça risque de durer longtemps. Plus il y a de complexités dans l’appareil, plus il risque de casser rapidement. Les vendeurs le savent. C’est ça l’obsolescence programmée. Pour un vieux frigo, un réparateur peut venir pour 200 $ et ça vaut la peine parce que ça va durer longtemps. Pour un neuf, le réparateur va coûter le même prix, mais il ne va garantir son travail que pour trois mois et c’est tout », dit-il.

Un frigo qui laisse fuir 25 % de son réfrigérant par année contribue presqu'autant aux changements climatiques qu'une plinthe électrique utilisée pendant un an là où l'électricité est produite avec une énergie fossile. Selon Neri et Zuluaga, une thermopompe qui perd 10 % de son réfrigérant par année n'est pas meilleure pour le climat qu'un chauffage radiant alimenté au gaz naturel. Détails sur https://www.buildinggreen.com/sites/default/files/ebn/TBGR_26-11_0.pdf

Restaurer ou recycler

Emmanuel Blain Cosgrove estime que le Québec devrait rapatrier tous les vieux frigos disponibles, les restaurer et les remettre sur le marché. « Ce n’est pas vrai qu’on va économiser de l’électricité en changeant pour des neufs. Si on veut mettre des plaques en stainless sur nos portes, ça s’achète. Il est possible de faire un relooking sur son vieux frigo, qui aura l’air d’un neuf. »

Quand l’appareil ne peut plus fournir les services auxquels on s’attend, toutefois, il faut les recycler. « Pour l’environnement, c’est clair que le métal, le styromousse et les gaz frigorigènes qui sont dans notre frigo sont nocifs. C’est pourquoi il est important de le recycler lorsqu’il arrive en fin de vie », mentionne M. Blain Cosgrove

Écohabitation recommande de confier nos vieux appareils frigorifiques à une municipalité ou un détaillant certifié par le programme FrigoResponsable de l’entreprise sherbrookoise PureSphera qui les recycle à 96 %. Selon elle, « lorsqu’il est jeté aux ordures, un frigo émet jusqu’à 3,7 tonnes métriques en équivalent de CO₂, soit la même quantité émise par une voiture qui parcourt 17 500 km! » Malheureusement, au Québec, plus de 85 % des gaz du circuit réfrigérant et de la mousse isolante sont encore perdus dans l’atmosphère.

La bonne nouvelle, c’est que la règlementation québécoise oblige les fabricants d’électroménagers à mettre en place un système qui permette de récupérer 70 % des vieux réfrigérateurs, congélateurs et climatiseurs d’ici 2024.

Dans les années 1990, les fabricants ont cessé d’utiliser le gaz fréon (R-12) à base de chlore parce qu’il amincissait la couche d’ozone et contribuait au réchauffement planétaire s’il fuyait des frigos et autres climatiseurs. Son potentiel de réchauffement était de 10 900 fois celui du dioxyde de carbone (CO2). Depuis, le tétrafluoroéthane (R-134a) qui n’affecte pas l’ozone est utilisé comme réfrigérant. Cet hydrofluorocarbure a un potentiel de réchauffement planétaire 1 430 fois plus élevé que le CO2.

La cote ÉnerGuide

Si on ne trouve pas de vieux frigos et qu’on doit absolument en acheter un neuf, M. Blain Cosgrove recommande d’utiliser la cote ÉnerGuide. 

Il déconseille aussi les distributeurs d’eau et de glaçons dans les réfrigérateurs, car ils s’encrassent facilement. « Comme il est difficile de nettoyer tous les petits tuyaux, et qu’on n’y pense pas nécessairement, cet encrassement provoque une contamination de l’eau par des bactéries qui peuvent se multiplier », mentionne l’organisme dans l’article Moisissures, champs électromagnétiques… comprendre pour agir ! publié sur son site Internet en 2012.

L’organisme recommande de séparer les aliments par groupes (lait, œufs, viande, fruits) et de placer les viandes crues dans le bas pour éviter que le jus ne coule sur des aliments prêts à être mangés, qui pourraient ainsi se voir contaminés.

Par ailleurs, il est déconseillé de placer les aliments qui ont une courte durée de vie dans la porte du réfrigérateur, par exemple le lait ou les œufs, car les ouvertures fréquentes de la porte mettent ces aliments en contact plus fréquent à la température ambiante.

Les meilleurs choix

Le magazine spécialisé en consommation Protégez-Vous a récemment testé 82 réfrigérateurs dont les prix varient entre 650 $ et 14 500 $, pour établir un classement à l’intention des consommateurs. Les critères d’évaluation étaient l’exactitude de la température, son uniformité, la consommation d’énergie, le bruit et la commodité.

Trois modèles arrivent en première position avec une note de 83 %, mais ils coûtent jusqu'à 5 750 $! Le modèle General Electric GNE27JSMSS, le plus écoénergétique et considéré comme un bon choix, revient à seulement 1 700 $. 

Voir aussi le classement du magazine Consumer Reports, de l'Union américaine des consommateurs.

Sans fil et ondes nocives

Il n'y a pas qu'Emmanuel Blain Cosgrove qui déconseille l'achat d'appareils utilisant l’intelligence artificielle et proposant diverses applications reliées à un téléphone cellulaire. Physicien et professeur de toxicologie des champs électromagnétiques à la Faculté de médecine de l’Université McGill, Paul Héroux s’est penché sur la question dans l'article Réseau 5G et Internet des objets : un cheval de Troie, publié en février 2018 sur maisonsaine.ca.

La fameuse technologie cellulaire de cinquième génération (5G) permet plusieurs choses, mais comment fonctionne-t-elle? Le professeur Héroux explique que la technologie 5G utilise des micro-ondes pulsées de taille millimétrique. En 2018, ces ondes ont été démontrées cancérogènes dans deux études importantes portant sur des rongeurs, dont celle du US National Toxicology Program.

Paul Héroux questionne l’utilité, pour les citoyens, du réseau 5G qui soutient l’Internet des objets (IdO). « À l’avenir, la plupart des articles que vous achèterez contiendront une puce cellulaire qui générera des données qui seront recueillies par les entreprises et, ultimement, par les gouvernements. Au-delà d’une volonté implacable de faire exploser les ventes, peut-on voir autre chose dans le marché 5G-IdO moussé par les promesses d’une vie plus confortable et ’’intelligente‘‘? » 

Selon le physicien, tous ces objets connectés multiplieront inutilement notre exposition aux rayonnements de champs électromagnétiques (CEM) nocifs. Les ingénieurs ont réussi à étiqueter ce rayonnement comme inoffensif par un effort soutenu pendant plus de 50 ans, en monopolisant les comités de standardisation, dénonce M. Héroux.

« Le cellulaire a fait ses preuves comme outil de communication, mais il n’est pas nécessaire de le développer au-delà de sa capacité à transmettre de petits messages vocaux et écrits. La technologie 5G tente de transformer le cellulaire en centre d’amusement et de stimulation visuelle portatif pour des motifs purement commerciaux. Elle n’a pas d’importance stratégique réelle », poursuit M. Héroux dans son article intitulé « Réseau 5G et Internet des objets : un cheval de Troie ».  

Les basses fréquences

Tous les appareils électriques émettent aussi des CEM d’extrêmement basses fréquences, de 60 Hertz (Hz). C’est même le cas des cellulaires qui consomment typiquement 361 kWh par année, soit plus d’électricité qu’un frigo ENERGY STAR de taille moyenne, déplore Timothy Schoechle, secrétaire du comité international (ISO) sur la domotique dans son rapport Reinventing Wires recommandant de privilégier la fibre optique et le cuivre et non le sans-fil.

Un champ magnétique est créé autour de chaque conducteur électrique lorsqu’il est parcouru par un courant électrique et plus le courant est élevé, plus ce champ sera élevé. Les experts comme Paul Héroux recommandent d’éviter de s’exposer de façon prolongée à un champ magnétique mesurant plus de 1 milligauss (mG). Ceci car plusieurs études ont démontré que le risque de leucémie infantile double à une exposition moyenne de 3 ou 4 mG, ce qui a incité l’Organisation mondiale de la santé à classer ces champs de « peut-être cancérogènes pour l’humain », en 2002. Heureusement, l’intensité de ces champs diminuent au carré de la distance : elle est typiquement négligeable à partir d’un pied et typiquement à au moins trois pieds pour les appareils consommant le plus d’électricité, comme les cuisinières et les fours grille-pain.

Les appareils électriques branchés dans un circuit sous tension émettent aussi des champs électriques dont l’intensité dépend du voltage (la tension). Ces champs sont facilement blindés par les métaux, toutefois. Par contre, les champs magnétiques traversent les matériaux, par exemple des murs et planchers. « L’emplacement des appareils électroménagers dans la maison est donc très important. S’ils sont mal placés, les personnes vivant dans la maison peuvent être exposées à des niveaux élevés de rayonnements électromagnétiques », affirme le site de l’entreprise israélienne No radiation for you (norad4u.com). Le moyen le plus sûr de réduire les rayonnements électromagnétiques 60 Hz dans une chambre est d’éloigner les appareils à trois pieds des lits, voire de les débrancher ou d’éteindre le disjoncteur du circuit desservant la chambre.

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