Responsable de 16 % des cas et des décès par cancer du poumon au pays selon Santé Canada, le radon est un gaz radioactif issu de la décomposition de l'uranium dans le sol, l'eau et les roches. Sa concentration dans une maison varie non seulement en fonction de la géologie du sol mais aussi selon des facteurs saisonniers ainsi que les caractéristiques de construction et d’utilisation de chaque maison. Il s’infiltre principalement à travers les sols en terre battue, les puisards, les drains de sous-sol, les murs en blocs de béton ainsi que les fondations et les planchers de béton même s’ils semblent non fissurés.
Santé Canada recommande de mesurer le radon idéalement pendant trois mois en hiver, alors que les concentrations de polluants sont plus élevées en raison de l’échange d’air réduit. Le test se fait le plus souvent à l’aide d’une chambre d’ionisation en plastique renfermant un disque appelé électret et que l’on envoie à un laboratoire pour fins d’analyse. Le test utilisé par les agents d’immeuble, d’une durée de deux à sept jours, tient moins compte des variations saisonnières que les tests d’un à trois mois.
« Pour déterminer correctement l’exposition et le risque des gens, il faudrait probablement faire deux mesures d’une semaine, l’une en hiver et l’autre en été au cas où un climatiseur risque de dépressuriser la maison quand le sol est plus sec et moins résistant au flux des gaz souterrains », estime l’ancien chercheur de la SCHL Jim White.
Selon un avis juridique obtenu par le CAA-Québec, « la présence de radon en concentration supérieure à 200 Bq/m3 d’air dans une résidence est un vice qui devient caché dès lors qu’un vendeur qui en est informé choisit de ne pas le déclarer. La présence de radon devrait toujours être mentionnée lors de la vente d’un immeuble, et ce, même si des travaux d’atténuation ont été effectués depuis la conduite des tests. L’acheteur prudent et diligent pourra demander d’effectuer un test de radon avant d’acheter une résidence, mais ce test sera effectué à ses propres frais, au même titre qu’une inspection préachat. »
Le physicien Michel Deschamps, cofondateur du laboratoire d’analyse indépendant Québec Radon et membre du conseil d’administration de la nouvelle Association canadienne des scientifiques et technologues du radon (ACSTR), favorise une mesure d’un mois lorsque la maison est fermée (plus pratique en saison froide). « Cependant, une mesure avec deux moniteurs de trois à sept jours lors des transactions immobilières renseigne de façon acceptable. Ces mesures assurent au moins deux périodes d’une journée complètes pour compenser les variations jour-nuit. Cette approche suit les recommandations de l’Agence américaine de protection de l’environnement (EPA). Il est à souligner que l’ACSTR endosse les procédures de mesure de l’EPA et de Santé Canada. Québec Radon utilise des moniteurs certifiés NEHA-NRPP de diverses sensibilités selon la situation, qui assurent une grande précision pour des tests de trois jours à un an. »
Agir rapidement
Lorsque la concentration de radon se situe entre 200 et 600 Bq/m3, Santé Canada recommande de procéder à des travaux de mitigation du radon au plus tard dans les deux prochaines années. Lorsqu’elle dépasse 600 Bq/m3, les travaux devraient être entrepris dans les prochains 12 mois.
Les travaux requis consistent à améliorer l’étanchéité et la ventilation de la partie inférieure de la maison pour abaisser la concentration de radon au plus bas niveau possible. Ils peuvent coûter entre quelques dizaines ou centaines de dollars en construction et jusqu’à 3 000 $ en rénovation pour dépressuriser l’air sous la dalle de béton qu’il faut alors percer.
Depuis 1995, le Code national du bâtiment (CNB) renferme des exigences permettant de réduire l’infiltration de gaz souterrains tels que le radon, comme l’imperméabilisation des fondations, la ventilation et la bonne qualité du béton. « L’édition 2005 du CNB contient également des exigences minimales qui sont autant d’obstacles à l’infiltration des gaz souterrains, comme l’étanchéisation du périmètre de la dalle de sol et le scellement des points de pénétration à travers la dalle (comme les drains de sous-sol), de même que la dépressurisation sous le plancher et la ventilation dans les bâtiments », écrivait en 2009 Frank Lohmann, conseiller technique au sein du Centre canadien des codes de l’Institut de recherche en construction du Conseil national de recherches du Canada (CNRC).
Toutefois, ces mesures ne sont appliquées avec succès que dans les régions où les municipalités adoptent ces provisions du Code et inspectent les chantiers, selon une étude effectuée en 2008 par le CNRC. C’est le cas dans les municipalités d’Oka et de Mont-Saint-Hilaire et certaines villes du Manitoba, de la Nouvelle-Écosse et de la Colombie-Britannique.
Méthodes d’atténuation
En 2007, l’abaissement à 200 Bq/m3 de la concentration de radon jugée acceptable dans les maisons par Santé Canada a entraîné le resserrement de la réglementation dans les bâtiments : le CNB 2010 exige qu’une membrane de polyéthylène soit posée sous un plancher sur sol pour empêcher l’infiltration des gaz souterrains et que les puisards soient scellés à l’aide d’un couvercle étanche à l’air. Le nouveau Code, dont les articles sur les gaz souterrains sont adoptés et appliqués par très peu de municipalités, prévoit deux méthodes permettant de réduire les coûts nécessaires à l’atténuation du radon dans l’éventualité où un test révélerait que sa concentration est dangereuse.
« En exigeant que toutes les maisons neuves soient équipées des canalisations nécessaires à l’installation d’un futur système d’extraction du radon, on s’assure que des mesures pour l’éliminer pourront être mises en œuvre rapidement et à un coût raisonnable — si cela devait s’avérer nécessaire », écrivait M. Lohmann.
Le programme volontaire de certification LEED pour les habitations durables exige aussi d’installer un système de base d’atténuation du radon. Mais un test de radon est impératif même si l’habitation est dotée d’un tel système de base, souligne Alexandre Deschamps, responsable de ces tests chez Québec Radon. « Si le système de canalisation est scellé et n’aboutit pas dehors, il donne une fausse impression de sécurité car il n’a aucun impact sur la concentration de radon intérieure. Et si le système est ventilé vers l’extérieur, il faut s’assurer qu’il est efficace et que la concentration de radon à laquelle les gens sont exposés est acceptable. »
Et quels sont les coûts des canalisations d’un système de base? « Si on ne compte que la portion sous la dalle de béton, les coûts sont minimes, soit moins de 10 $ de matériaux, explique André Gagné, directeur du service technique de l’Association provinciale des constructeurs d’habitation du Québec. Premièrement, ces travaux ne relèvent pas de la plomberie, donc ils peuvent être effectués par un manœuvre de la construction. En second lieu, le Code n'exige pas la pose du conduit jusqu'au grenier, mais simplement que le conduit provenant du dessous de la dalle soit monté jusqu'à 12 po [30 cm] au dessus de cette dernière. Finalement, Santé Canada dans son document propose une sortie latérale, qui est à mon avis plus facile à réaliser et risque moins de créer des problèmes de condensation qu’une sortie par le grenier. On utilise un drain de 4 po [10 cm] homologué BNQ [Bureau de normalisation du Québec] à élément épurateur d'une longueur de 48 po [120 cm], un coude de 90 degrés, le tuyau vertical et un bouchon fileté; c'est la préparation de base. »
Par contre, l’ingénieur Yves Parent, premier québécois formé et certifié en atténuation du radon par le National Radon Safety Board américain, préfère de loin la sortie de l’évent par la toiture. « Les études sur les sorties latérales ne sont pas concluantes et les Américains ont 25 ans d’expérience avec la sortie par la toiture, alors pourquoi changer quelque chose qui fonctionne bien? »
La sortie latérale ne respecte pas les normes américaines d’atténuation du radon, explique M. Parent, de la compagnie RN Services, qui a complété sa formation en la matière à l’Université de l’Illinois, à Chicago. « La sortie de l’évent doit être à un minimum de 10 pieds [3 m] au-dessus du sol et être au-dessus des fenêtres ouvrantes et de la ligne basse de la toiture. La sortie horizontale sera froide et pourrait condenser, dégoutter et former de la glace à l’extérieur. C’est délicat, car il faut tenir compte de l’ensoleillement et des vents dominants pour éviter un risque de reprise du radon par les fenêtres. De plus, les études démontrent que les concentrations de radon peuvent être extrêmement élevées sous les dalles, alors je ne suis pas chaud à l’idée d’évacuer ça dans le visage d’enfants qui joueraient à proximité. Comme le sol est souvent très humide, l’évacuation peut aussi former un panache de vapeur blanche comme une sortie de sécheuse. »
Selon Yves Parent, qui a 17 ans d’expérience en mécanique du bâtiment, il faut compter au moins 200 $ à 300 $ pour bien installer un système de base d’évacuation du radon dans une unifamiliale en construction, au lieu de jusqu’à 3 000 $ en rénovation. Les travaux prennent environ quatre heures, incluant la pose d’un solin de toiture, d’une prise électrique ainsi que d’isolant et d’un pare-vapeur autour de la tuyauterie dans les combles. « C’est mieux de le faire durant la construction, quand le couvreur et l’électricien sont présents, autrement ça coûte excessivement cher par la suite. »
De plus, suivant les normes américaines, il recommande de relier le sous-sol et la toiture avec un tuyau de PVC (polyvinyle chloré rigide) blanc plutôt qu’un tuyau d’ABS (acrylonitrile-butadiène-styrène) noir afin d’éviter qu’un plombier ou un autre ouvrier le prenne ultérieurement pour un tuyau de plomberie. L’idéal est de lui faire longer l’évent de plomberie, mais dans les maisons déjà construites à aires ouvertes, certains percent la solive de rive et le font monter sur le mur arrière de la maison. En climat froid, il faut alors poser isolant, pare-vapeur et tôle d’acier protectrice.
Si un test révélait que la maison renferme des concentrations dangereuses de radon, l’on poserait le ventilateur dans les combles en le protégeant par de l’isolant et un pare-vapeur pour isoler la condensation. « On met toujours le ventilateur près de la sortie, dit Yves Parent, afin d’éviter de pousser du radon dans la maison si jamais la tuyauterie se mettait à fuir. »
Bien qu’il recommande de placer la tuyauterie sous et à travers la dalle en construction, il souligne que c’est surtout le fait de monter le tuyau de PVC jusqu’à la toiture qui réduit les coûts. Dans une maison existante, les travaux d’atténuation n’exigent pas d’ajouter un tuyau perforé sous la dalle. « Ça prend 15 minutes pour percer un trou de 5 po [12,5 cm] de diamètre à travers la dalle et un autre 15 minutes pour vider l’équivalent d’une chaudière de 20 litres de concassé pour créer un espace vide de 8 à 12 po [20 à 30 cm] qu’on appelle le puits de succion. Si le milieu de la maison est soutenu par un mur de béton porteur déposé sur une semelle ou dotée d’un garage attaché, il faut creuser plus d’un puits pour dépressuriser sous toutes les dalles. »
Pour en savoir davantage, lire notre dossier Le radon tue deux fois plus que les accidents routiers
https://maisonsaine.ca/sante-et-securite/radon-tue-deux-fois-plus-que-accidents-routiers.html
Le radon : Guide à l'usage des propriétaires canadiens :
http://www.cmhc-schl.gc.ca/odpub/pdf/61328.pdf?lang=fr
Votre santé et vous - Radon (Santé Canada)
http://hc-sc.gc.ca/hl-vs/iyh-vsv/environ/radon-fra.php