Le vitrage excessif est très coûteux et crée de l'inconfort thermique, augmentant les coûts de chauffage (en particulier dans les pièces surfenestrées au nord) et de climatisation.

Comme le verre triple à faible émissivité coûte plus cher que le verre double (et jusqu'à sept fois plus cher qu'un mur bien isolé), et sachant qu'il réduit les gains solaires parce qu'il est plus isolant, lequel des deux devrait-on poser sur un mur sud qui n'est pas ombragé par des arbres ou un bâtiment afin d'obtenir le meilleur rendement énergétique annuel? J'ai posé la question à l'organisme Écohabitation et au ministère Ressources naturelles Canada (RNCan).

L'ingénieur Denis Boyer, coordonnateur de l'efficacité énergétique chez Écohabitation, répond : 

« Personnellement, je doute que le verre double puisse donner un confort comparable au triple. 
  • Pendant le jour, lorsque le soleil est à la bonne place, les gains risquent de causer une surchauffe si on a sélectionné un vitrage double à gains solaires élevés.
  • La nuit et les journées nuageuses, des pertes importantes et de l'inconfort pour ceux qui sont près des fenêtres dû à la convection (équivalent à un courant d'air causé par une fenêtre ouverte) et la radiation "froide" (pas tout à fait le bon terme mais ceci décrit bien le ressenti).
Peut-être que le bilan annuel est comparable mais c'est sans tenir compte des variations de température, des occupants et de leur bien-être.
Le vitrage triple est également très supérieur pour insonoriser des bruits extérieurs (circulation des voitures, tondeuses à gazon, souffleuse à neige ! 
 
Si on veut du gain solaire, le triple peut le fournir. Si on veut une bonne isolation, le double ne peut pas.
Au Québec, le gouvernement oblige les pneus d'hiver dès le 1er décembre parce qu'on est dans un climat qui le requiert. On devrait aussi obliger le vitrage triple, parce que... le climat [est froid]! »
Son collègue l'ingénieur Benjamin Zizi, directeur technique chez Évaluations Écohabitation, ajoute : 
« La performance d'une enveloppe est globalement fixée par ses éléments les plus faibles, qui sont normalement les fenêtres à moins d'un design qui sort vraiment de l'ordinaire (bois rond par exemple). Donc compenser une performance moindre en fenestration avec l'ajout d'isolant ailleurs n'est généralement pas pertinent, rentable ou possible. Les fenêtres sont vraiment un des leviers les plus importants en efficacité énergétique d'enveloppe.
Personnellement je n'ai jamais aimé l'approche du double au sud et du triple ailleurs qu'on entend depuis plusieurs années. Effectivement, cela peut sortir mieux sur les modélisations énergétiques sur un bilan global annuel, mais la différence est faible, et ne tient pas compte des désavantages (surchauffes principalement, inconfort, etc etc). Elle a aussi l'inconvénient de provoquer l'ajout de vitrage au sud pour aller chercher plus de gains solaires, ce qui n'est pas une bonne idée.
L'approche simple que je préconise avec les fenêtres :
- minimiser le pourcentage global de fenêtres sur la maison selon le design et l'accès visuel à l'extérieur
- choisir les fenêtres les plus efficaces en isolation possibles (avec des matériaux plus nobles, si possible, et des types d'ouverture et quincaillerie plus efficaces en étanchéité à l'air)
- porter une attention particulière à l'installation de la fenêtre (ça ne sert à rien d'avoir une excellente fenêtre mal installée)
- si possibilité et ouverture du fournisseur, choisir le type de Low E [faible émissivité] selon l'orientation des fenêtres et les ombrages. »
Enfin, voici la réponse du service des communications de RNCan :

« C’est possible [de préférer le verre double au triple], mais non recommandé à moins de prendre en considération plusieurs facteurs, puisqu’il y a des risques que cela mène à la surchauffe de la maison ou de certaines pièces de la maison pouvant causer de l’inconfort. Il est aussi à noter que les fenêtres à vitrage double ont en général une plus faible valeur d’isolation et pourraient donc possiblement être plus sujettes à la condensation.

Une bonne pratique est de choisir des fenêtres affichant une valeur U [résistance au transfert de chaleur] la plus basse possible afin de réduire les pertes de chaleur, d’améliorer le confort des occupants et de diminuer le risque de condensation. De plus, en général, on devrait choisir des fenêtres affichant un coefficient de gain de chaleur solaire (CGCS) de bas à moyen afin de réduire les risques de surchauffe. Pour le facteur U, cela voudrait dire des valeurs de l’ordre de 1,22 ou moins (les unités sont en W/m2·K). Pour le CGCS, une valeur basse serait inférieure à 0,3, tandis qu’une valeur moyenne serait de l’ordre de 0,3 à 0,4.

Le rendement énergétique [RE, somme des gains solaires moins les pertes de chaleur par condution ou facteur U et les pertes par fuites d'air] est un autre paramètre de rendement dont on peut tenir compte lors du choix d’une fenêtre. Des explications plus détaillées sur le paramètre de RE se trouvent dans la norme A440.2/440.3-19 de l’Association canadienne de normalisation (CSA) [et sur le site de RNCan].

Considérations supplémentaires 

Pour les maisons qui sont très bien isolées et étanches, certaines conditions pourraient entraîner une chaleur excessive à l’intérieur durant une longue période, causant éventuellement de l’inconfort aux occupants. Cette situation se produit notamment lorsqu’il y a abondance de rayonnement solaire (même au cours des mois d’hiver), si une pièce est exposée à de longues heures d’ensoleillement durant la journée (si la façade est orientée au sud ou à l’ouest) ou si la maison a été construite avec de très grandes fenêtres (un rapport fenêtrage-mur élevé) [soit un vitrage au sud dépassant 6 % de la superficie totale des pièces chauffées d'une maison à haut rendement ou de grandes fenêtres à l'ouest].

Il faut donc prêter une attention particulière pour contrebalancer les effets ci-dessous. Dans les régions comme le Canada, la chaleur solaire est un élément important qui contribue à réduire la demande exercée sur le système de chauffage et à diminuer par le fait même la consommation d’énergie annuelle. Toutefois, des produits de fenêtrage présentant un CGCS élevé risquent de causer une chaleur excessive. Dans les maisons bien isolées et étanches, cet effet peut être amplifié et, par conséquent, il doit être considéré avec attention.

La liste suivante peut être utile pour déterminer les endroits exposés à un risque de chaleur excessive1 :

· les pièces ayant des fenêtres ou des portes de verre coulissantes orientées au sud ou à l’ouest;

· les pièces affichant un rapport fenêtrage-mur élevé (> 20 %) peu importe l’orientation (sauf celles faisant face au nord);

· les maisons ayant une charge de refroidissement plus élevée comparativement à la charge de chauffage;

· et les maisons sans mesures d’atténuation des gains solaires passifs (p. ex., sans auvents ou avec des surplombs minimaux).

1. Il est aussi possible de simuler les pertes et les gains thermiques dans une pièce selon la norme CSA F280-F12 – Détermination de la puissance requise des appareils de chauffage et de

refroidissement résidentiels.

Les mesures suivantes peuvent être appliquées pour améliorer les conditions dans les pièces sujettes à une chaleur excessive :

· installation de fenêtres affichant un CGCS bas de l’ordre de 0,18 à 0,30 ;

· installation d’un dispositif fixé à la fenêtre, comme un auvent rétractable ;

· plantation d’arbres feuillus à croissance rapide pour donner de l’ombrage et réduire les coûts liés à la climatisation durant l’été, et permettre un gain d’énergie solaire pour chauffer la maison durant l’hiver.

On devrait installer des fenêtres ayant un CGCS élevé seulement en présence d’éléments de conception de bâtiment solaire passif, comme une masse thermique [planchers ou murs en matériaux massifs comme la céramique, le béton et la brique] qui emmagasine la chaleur excessive pour la libérer plus tard dans la journée. Un autre élément essentiel consiste à bien planifier l’ombrage extérieur et la ventilation naturelle afin de réduire les gains solaires durant l’été. Sans ces éléments en place pour extraire la chaleur de manière utile, le gain solaire passif peut causer une chaleur excessive.

Les maisons canadiennes devraient idéalement conserver un taux d’humidité relative entre 30 % [par grands froids] et 50 % [par temps chaud] durant les mois d’hiver pour favoriser la santé des occupants et assurer un degré de confort optimal, et pour réduire les dommages aux éléments architecturaux, comme la menuiserie préfabriquée et le revêtement de sol. La condensation pourrait être évidente sur le fenêtrage dans certaines circonstances, comme un taux d’humidité intérieure élevé combiné à une température extérieure froide.

Comme la condensation survient lorsque la température de la surface intérieure du verre est inférieure au point de rosée, les produits qui conservent une température plus élevée de la surface intérieure du verre sont plus résistants à la condensation. La résistance à la condensation d’une fenêtre indique à quel point la fenêtre résiste à la formation de condensation sur la surface intérieure. Il existe trois systèmes de cotation pour déterminer la résistance à la condensation.

Ressources techniques 

ParamètreNormeÉchelle
Indice de températureAssociation canadienne de normalisation (CSA A440.2/A440.3-19)1 à 100 (plus la valeur est élevée, mieux c’est)
Résistance à la condensation (CR)National Fenestration Rating Council (NFRC 500- 2017)1 à 100 (plus la valeur est élevée, mieux c’est)
Facteur de résistance à la condensation (CRF)American Architectural Manufacturer Association (AAMA 1503-2009)30 à 80 (plus la valeur est élevée, mieux c’est)

  

 

L’adresse suivante mène à des renseignements additionnels sur les mesures à prendre pour réduire au minimum la condensation :

rncan.gc.ca/energie/produits/categories/fenetrage/18940 »