L’Association pour la santé environnementale du Québec (ASEQ) demande au ministère de la Santé et des services sociaux de rendre dès que possible tous les établissements de soins de santé du Québec sans parfum ni fragrance, tel que recommandé par l'Association médicale canadienne et comme l'ont déjà réalisé trois provinces.
Lorsqu’exposés à des parfums ou fragrances, près de 30 % des Canadiennes et Canadiens ont des symptômes tels que des maux de tête, de la nausée, de la toux ou des éruptions cutanées, et des crises d’asthme peuvent être déclenchées chez 4 % de la population. L’exposition à des fragrances dans un milieu médical peut constituer une barrière pour accéder à des soins de santé. Des patients cardiorespiratoires peuvent devenir malades à un point critique lorsqu’ils sont exposés à des fragrances. Les personnes souffrant d’asthme et autres troubles respiratoires, de migraines, de dermatite et d’hypersensibilité chimique multiple (MCS) deviennent plus malades et certains s’abstiennent même d’accéder à des soins de santé en raison des effets de l’exposition à des fragrances.
Au Canada, 1 008 400 personnes ont été diagnostiquées comme souffrant d’hypersensibilité chimique multiple par un professionnel de la santé, et au Québec, ce sont 230 500 personnes qui ont reçu le même diagnostic médical (Statistique Canada, 2016).
L’application de parfums artificiels sur le corps est une pratique inacceptable dans les hôpitaux parce que 27 % des asthmatiques disent qu'il aggravent leur maladie, selon l’éditorial du 3 novembre 2015 paru dans le Journal de l’Association médicale canadienne, lequel concluait : « Il n’y a donc pas lieu de continuer de tolérer les parfums artificiels dans les hôpitaux (…) Il devrait être interdit de porter des parfums artificiels dans tous les hôpitaux, ce qui favoriserait la sécurité des patients, du personnel et des visiteurs. »
Toute personne a le choix de porter ou non du parfum. Mais la personne qui réagit aux fragrances, elle, n’a aucun choix ni aucun avertissement lorsqu’elle y est exposée. Ces produits sont socialement utilisés par plaisir; toutefois, ceux qui y réagissent souffrent sévèrement d’isolement social. L’accès à des services de base devient alors difficile, voire impossible, pour ces personnes.
Nous sommes fortement d’avis que les fragrances n’ont aucune place dans quelque milieu de soins de santé que ce soit, et qu’un air de qualité libre de fragrances est un droit humain fondamental. C’est pourquoi nous prions tous les établissements de soins de santé et les hôpitaux à travers le Québec de devenir libres de parfums et fragrances, en concordance avec un tel droit.
Les arguments en faveur de la création de soins de santé au Québec sans fragrances
Depuis de nombreuses années, l’ASEQ entend des histoires de détresse et des plaintes de la part d’un grand nombre de ses membres, qui, lorsqu’ils tentent d’accéder à des soins de santé, deviennent plus malades, en raison des substances chimiques présentes dans les hôpitaux et les cliniques, particulièrement les fragrances. Plusieurs membres vont jusqu’à éviter de se rendre dans des établissements de soins de santé, même lorsqu’ils en ont grandement besoin, seulement afin d’éviter d’être plus malades! Toutefois, il existe dorénavant de fermes données scientifiques qui démontrent que les fragrances synthétiques ont des effets néfastes sur la santé, non seulement pour les personnes ayant des hypersensibilités environnementales (HE) comme l'hypersensibilité chimique multiple (HCM) ou l'électrohypersensibilité (EHS) qui sont souvent combinées, mais aussi pour ceux souffrant d’asthme et autres conditions respiratoires, de migraines, et même de dermatite. C’est pourquoi les fragrances constituent une barrière à l’accès à des soins de santé, ce qui constitue un droit universel. En fait, le droit d’une personne de respirer de l’air pur est au-dessus de tout droit tel que fumer ou porter des produits qui rendent les autres malades…
Les fragrances chimiques sont fréquemment utilisées dans divers types de produits de consommation, tels que des parfums, des déodorants, des lotions, des produits de nettoyage, des assouplisseurs de tissus, des soi-disant « assainisseurs » d’air, etc. L’industrie des fragrances utilise près de 4 000 substances chimiques, et un seul parfum peut contenir jusqu’à 500 différentes molécules, la plupart d’entre elles synthétiques. Ainsi, les fragrances sont omniprésentes dans notre vie quotidienne, et nous savons maintenant qu’elles ont un impact négatif significatif sur l’environnement, la qualité de l’air intérieur (QAI), et notre santé. Cependant, à ce jour, il existe un manque de divulgation des ingrédients dangereux par les fabricants de produits parfumés au Canada, ce qui freine la recherche et empêche de protéger la santé de la population. Aussi, puisque les personnes sont exposées quotidiennement à un cocktail de fragrances et substances y étant reliées, une sensibilisation peut survenir et être le prélude au développement d’une condition de santé chronique, telles que celles mentionnées ci-dessus. C’est pourquoi la prévention de telles expositions devrait être une priorité. De plus, les effets adverses des fragrances ou des produits parfumés chez les enfants et les adultes implique de multiples systèmes, causant des problèmes respiratoires, neurologiques, dermatologiques, musculosquelettiques, cardiovasculaires et gastro-intestinaux.
Quiconque pourrait dire : « mais, les fragrances n’affectent que très peu de personnes, alors pourquoi en faire tout un plat? ». Quelle erreur ! En réalité, des recherches ont démontré que près d’un tiers de la population générale est affectée par des fragrances, alors que 40 % des asthmatiques et plus de 70 % des personnes souffrant d’hypersensibilité chimique peuvent devenir littéralement malades lorsqu’exposés à ces substances synthétiques (Caress & Steinemann, 2009). Ainsi, comme on peut le voir, les parfums portés par certains par plaisir peuvent être le poison de plusieurs autres…
De plus, au cours de la dernière décennie, la prévalence d’HE diagnostiquée par un médecin a augmenté de 300 %, et pour les cas autodéclarés, de 200 % (Steinemann, 2018). Entre 2015 et 2016, au Canada, elle a augmenté de 7 % (Statistiques Canada, 2016), ce qui constitue une préoccupation de santé publique majeure.
C’est pourquoi offrir des soins de santé sans fragrances au Québec est la bonne chose à faire : cela permet un accès sécuritaire à des soins médicaux pour les personnes les plus vulnérables de notre société, tout en protégeant la population générale et l’environnement. Si d'autres provinces (Ontario, Colombie-Britannique et Nouvelle-Écosse) ont réussi à relever le défi, le Québec est plus que capable de rendre ses établissements de soins de santé sans fragrances, et ce faisant, d’accommoder légalement les personnes souffrant d’HE, en concordance avec la Commission canadienne des droits de la personne (CHRC, 2014; Sears, 2007). Les établissements de soins de santé sont des lieux pour guérir, non pas pour devenir plus malade. Aucun travailleur de la santé ne souhaite rendre les gens malades, mais c’est ce qui arrive quand des fragrances sont utilisées. C’est pourquoi « les parfums artificiels n’ont aucune place dans nos hôpitaux » (Flegel & Martin, 2015).
Sur notre site Web, vous trouverez plus d’information sur les fragrances et leurs effets, une revue de littérature sur le sujet, des documents expliquant comment établir une politique sans-fragrance dans des établissements de soins de santé, ainsi que des ressources et conseils sur des produits sans-fragrance et santé, de même que des dépliants et affiches.
SVP : lisez, partagez, et passez à l’action! Nous avons aussi besoin de vos témoignages : nous pouvons les garder confidentiels, et même les prendre au téléphone. Il est important que tout le monde sache que le manque d’accommodation ‘sans-fragrance’ nie l’accès à des soins médicaux à beaucoup trop de personnes, et que cela engendre une grande souffrance.
Votre participation est le souffle qui peut donner de la force à ce projet. Il est temps de changer.
L'ASEQ remercie toutes les personnes impliquées dans ce projet.
Ce projet est réalisé avec la collaboration de :
Rohini Peris et Michel Gaudet de l'ASEQ
Clinique de santé environnementale, Hôpital Women’s College – Toronto, Ontario;
Dr. Lynn Marshall, présidente du conseil d’administration de l’Institut pour la santé environnementale du Canada, membre de l’Association canadienne des médecins pour l’environnement, et médecin à la Clinique de santé environnementale, Hôpital Women’s College, Toronto;
Dr. Ken Flegel, professeur de médecine interne, Université McGill, Montréal, Québec;
Dr. John Molot, médecin, Clinique de santé environnementale, Hôpital Women’s College, Toronto;
Dr. Meg Sears, présidente du conseil d’administration de « Prevent Cancer Now »;
Farah Ahmed (BDS, M.Sc);
Faisal Mirza (M.Sc, MBA, P.G.D.AE);
Robert Morariu;
Mélanie Bélanger, M.Sc;
GreenHealthCare.ca;
Magazine La Maison du 21e siècle.