Par Tim Birnie, birnie.com
Paru dans le magazine HOME BUILDER, Septembre-Octobre 2016
Être propriétaire d’une vieille maison a ses charmes. Les nouveaux développements résidentiels sont incapables de reproduire l'architecture ancienne, l'artisanat et l'histoire unique qui font partie de la vie dans ces maisons au caractère distinct. Toutefois, bien que ces demeures soient uniques, leurs propriétaires réalisent qu’une façade attirante ne suffit pas à satisfaire les exigences du code de l’électricité d'aujourd'hui.
Selon les données recueillies par le biais du service de détection des risques électriques de mon entreprise Birnie Electric, 99 % des anciennes maisons inspectées présentent des défauts électriques, et 40 % d’entre elles affichent même des risques élevés d'électrocution.
D’après la Electrical Safety Foundation International (ESFI), plus de 51 000 incendies d’origine électrique se produisent chaque année en Amérique du Nord. Si un système électrique n’a pas été rénové en 50 ans, les risques d'incendie augmentent considérablement. La plupart des propriétaires ne sont pas conscients des dangers qui se cachent derrière leurs murs. C'est la raison pour laquelle je prône l'éducation de la sécurité électrique. Voici les six principaux dangers qui peuvent survenir lors de la réfection du système électrique des vieilles maisons.
1. Les circuits surchargés : Un circuit surchargé absorbe plus de courant que le circuit ne peut en supporter, ce qui se produit lorsque trop d’appareils sont branchés en même temps. Les appareils branchés devraient tirer seulement 12 ampères sur un circuit de 15 ampères, ou 80 % de la capacité du circuit. Les vieilles maisons ont souvent des circuits surchargés parce qu’elles ne possèdent pas l'infrastructure électrique appropriée ni les prises de courant adéquates pour alimenter les appareils en toute sécurité.
2. Le vieux câblage : Au fil du temps, les fils électriques derrière les murs se dégradent. Cette usure inévitable et la chaleur excessive causée par des circuits potentiellement surchargés endommagent l'isolation entourant les fils électriques, ce qui se produit fréquemment avec les systèmes de câblage électrique sur boutons et tube de porcelaine. Il s’agit d’une situation dangereuse parce que, sans isolation, les fils sous tension se trouvent exposés à l’air libre.
3. Les prises DDFT manquantes ou non fonctionnelles : la technologie DDFT (disjoncteur différentiel de fuite à la terre) a été lancée dans les années 1970. Ce système qui prévient les défauts à la terre et les risques d'électrocution est maintenant installé dans les endroits où l'eau peut être en contact avec des appareils électriques. Selon le Code de l'électricité, les prises situées à moins de 1,5 m des éviers, baignoires ou cabines de douche doivent être remplacées par des prises à DDFT. Aujourd'hui, les disjoncteurs différentiels sont disponibles sous forme de disjoncteur et de prise. Bon nombre de maisons plus anciennes n’ont pas de disjoncteurs de fuite à la terre ou ils ne fonctionnent pas parce que ce système n'existait pas lorsque la maison a été construite, ou le propriétaire n'a pas remplacé les prises tous les 10 ans.
4. Le câblage en aluminium : Contrairement à la croyance populaire, un système électrique utilisant des fils en aluminium doit être entretenu, il n’est pas nécessaire de le refaire. Il suffit, par exemple, de poser une nouvelle queue de cochon en cuivre entre le fil d'aluminium existant et le dispositif électrique; les prises et les interrupteurs doivent être remplacés par des réceptacles adaptés au câblage en aluminium. Les demeures câblées avec des fils d'aluminium sont 55 fois plus susceptibles de présenter un risque d'incendie que celles qui sont câblées avec des fils en cuivre si elles ne sont pas correctement entretenues.
5. Les rallonges : Malgré leur classification, les rallonges électriques ne doivent jamais être utilisées comme solution à long terme pour redistribuer l'énergie dans une autre partie de la maison. Certaines rallonges possèdent plusieurs prises de sortie, ce qui peut inciter les propriétaires à profiter des ports supplémentaires. Souvent les gens ne pas conscients que bien que le fabricant ait augmenté le nombre de prises sur la rallonge, l'ampérage de la maison n’a pas été augmenté. Nous avons visité des maisons où il y avait plus de rallonges que de circuits parce que le propriétaire désirait brancher ses appareils électroniques dans différents endroits de sa maison.
6. Les détecteurs de fumée : Dans environ 61 % des maisons inspectées, les avertisseurs de fumée sont inadéquats, périmés ou carrément inexistants. Il est essentiel d’installer des avertisseurs de fumée dans chaque chambre, entre les chambres, dans les couloirs où il y a des espaces pour dormir, et à chaque étage de la maison. Les avertisseurs de fumée branchés directement sur le système électrique de la maison doivent être remplacés tous les 10 ans. Les vieilles maisons devraient également être équipées d’avertisseurs de fumée à piles, car ceux qui sont branchés directement à l'alimentation électrique ne fonctionneront pas pendant les pannes de courant.
Les maisons anciennes possèdent un certain charme qui les rend très populaires auprès des couples de milléniaux sans parler des propriétaires qui ne peuvent envisager de se séparer de leur maison bien aimée. Les gens qui sont attirés par l’architecture et les caractéristiques uniques de ces anciennes maisons doivent être conscients que le système électrique, quant à lui, doit être digne des technologies du 21e siècle.
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En quoi consiste l’inspection électrique?
Par André Fauteux
« Dans l’ensemble de la maison, il faut vérifier les points chauds et la rétention mécanique, explique Michel Bonneau, directeur technique de la Corporation des maîtres électriciens du Québec (CMEQ). Quand vous branchez un appareil, la fiche doit être retenue solidement. La rétention mécanique insuffisante cause un mauvais contact qui pourrait à la longue provoquer un incendie. S’il y a échauffement du fil ou des traces jaunâtres autour de la prise, c’est à vérifier sans tarder. »
Selon l’électricien Jean-Claude Morin, de Magog, l’inspection visuelle et technique de l’installation électrique d’une maison de 2 000 pi2 peut facilement durer une journée complète. « On pose des questions au propriétaire, on regarde le panneau principal et on ouvre les prises, interrupteurs, thermostats et autres appareils. Souvent, on découvre que les plinthes électriques posées par le consommateur ou un électricien ont un fil corrodé. Il y a un mauvais contact. »
L'électrosmog
Et les champs électromagnétiques (CEM)? « Si on respecte le Code, on n’aura pas de problèmes de CEM, répond Michel Bonneau. Selon une enquête de Protégez-Vous et de l’École de technologie supérieure, le réveil-matin électrique était l’une des principales sources de CEM parce qu’il est toujours allumé. Vous avez une bobine électrique en permanence à côté de la tête. »
Jean-Claude Morin, justement spécialiste en mitigation des CEM, nuance ces propos. Il est vrai que le non-respect du Code peut générer des CEM, par exemple si l’on raccorde le fil neutre (par lequel le courant doit retourner au réseau) de deux circuits différents dans la même boîte de jonction. « Ça crée une boucle de courant et peut générer un gros champ magnétique » généré par ces courants.
Par contre, certaines pratiques courantes et légales peuvent aussi vous surexposer aux CEM, par exemple à un champ électrique important si un câble de chauffage 240 volts passe sous un lit, ajoute M. Morin. Par ailleurs, bien des maisons sont traversées par un champ magnétique élevé qui circule sur la tuyauterie métallique sur laquelle le panneau électrique est mis à la terre. « Le courant est censé retourner complètement au réseau d’Hydro-Québec, mais pour diverses raisons une partie du retour peut passer par l’aqueduc et la terre. Par exemple, si les câbles sont trop petits pour transporter tout le courant (pensez à un tuyau plein d’eau) ou s’il y a des mauvais raccords. » Cet expert dit souvent mesurer de 2 à 4, parfois même 8 ampères sur la plomberie métallique de 50 % des maisons où il intervient. « Ça donne un champ magnétique de 200 à 300 nanotesla (nT) [de 2 à 3 milligauss ou (MG)] partout dans la maison. » Or, le risque de leucémie infantile double chez les enfants exposés de façon chronique à un champ de 3 ou 4 mG, selon plusieurs études cités par le Centre international de recherche sur le cancer qui a classé les champs magnétiques domestiques (60 hertz) de « peut-être cancérogènes » en 2001.
Sur certains sites ruraux où le seul est peu conducteur, avec une tige de mise à la terre (MALT) plantée à 10 pouces des fondations, l’armature des fondations et de la dalle du sous-sol peut même être contaminée par une tension résiduelle élevée, de 200 volts par mètre (V/m), selon M. Morin. Les experts en biologie du bâtiment (baubiologie.fr) recommandent de ne pas dépasser 5 V/m.
Le problème, c’est qu’en l’absence d’une entrée d’eau métallique, la Régie du bâtiment exige d’effectuer la MALT seulement sur deux tiges reliées et plantées à 10 pieds de distance, ce qui suffit pour prévenir les risques d’électrocution. « La Régie n’exige même pas que l’on mesure la résistance de la MALT », déplore Jean-Claude Morin. Or, pour neutraliser les champs électriques et les tensions parasites, « avec des installations récentes protégées par un interrupteur ou disjoncteur différentiel haute sensibilité (...), une résistance de 50 ohms peut être considérée comme la limite maximale acceptable », affirme l’électricien français Claude Bossard, expert en la matière. Selon Jean-Claude Morin, à la campagne, la moitié des MALT sont déficientes à ce chapitre. « Les charges électriques circulant dans les maisons sont plus élevées aujourd’hui qu’autrefois et elles ne sont pas équilibrées dans les maisons ni sur le réseau d’Hydro, ce qui génère des CEM importants. Des fois, je mesure des courants résiduels de 1 500 à 2 000 nT [20 mG] dans les planchers! »
Bref, traitez votre système électrique comme vous traitez votre véhicule : pour assurer la sécurité de votre famille, faites-le inspecter par un expert compétent.
Pour en savoir davantage
Installer une bonne prise de terre (terrevivante.org)
Tracing EMFs in Building Wiring and Grounding, 3e édition, Karl Riley, 2012