Les nanotechnologies promettent une nouvelle révolution industrielle qui promet de changer le monde, affirmait cet été dans la revue Construire le webmestre de l'Association de la construction du Québec, Amir Nadji. Reste à savoir si au bout du compte elle augmentera ou détériorera davantage notre qualité de vie. De l'échelle du milliardième de mètre, les particules nanométriques appliquées sur les matériaux promettent certes des avantages indéniables : vitrages autonettoyants, finis épurant l'air intérieur et vernis plus résistants.
Mais l'on sait déjà que les nanoparticules incorporées aux écrans solaires et aux vêtements soulèvent des controverses en matière de santé publique. Qu'en est-il des poussières nanométriques émises par les finis intérieurs?
Comme l'affirmait en 2009 le site Pour la science : « Dans le domaine de la santé, les interrogations sur le danger potentiel des nanomatériaux viennent du fait que les nanoparticules se rapprochent, par leurs dimensions, des particules atmosphériques ultrafines, des particules de diamètre inférieur à 0,1 micromètre émises par la combustion des énergies fossiles (automobiles, chauffage, activités industrielles). On sait qu'elles provoquent des pathologies respiratoires et cardiovasculaires et plusieurs dizaines de milliers de décès chaque année dans le monde. Les nanotubes de carbone ont été aussi rapprochés de l'amiante, cause avérée de plusieurs dizaines de milliers de cancers de la plèvre. »
Le très conservateur Institut national de santé publique du Québec soulevait aussi en 2006 des questionnements importants. Parler de structures moléculaires mesurant entre 1 et 100 nanomètres (aussi peu que 1/100 000 du diamètre d'un cheveu), c'est entrer dans le domaine inconnu de la physique quantique, où les propriétés mécaniques et magnétiques de chaque matériau peuvent être transformées de façon inattendue.
Si leurs effets sur la santé ont été peu étudiés, les connaissances actuelles ne sont guère rassurantes : « Les études épidémiologiques réalisées dans le domaine de la recherche sur les effets des particules ultra-fines nous renseignent sur leurs propriétés et sur leurs impacts sur la santé. Selon les résultats de ces études, il est plausible de croire que les particules nanisées puissent exacerber les maladies cardiaques voire provoquer des décès chez les personnes vulnérables, aggraver des symptômes d'asthme ou des maladies pulmonaires chroniques et évoluer éventuellement vers le cancer pulmonaire », souligne l'hématologue Pierre L. Auger de l'INSPQ, professeur de médecine à l'Université Laval et clinicien en médecine du travail et de l'environnement. Celui-ci citait un rapport publié en 2004 qui avait été commandé par le gouvernement britannique à la Royal Society et à la Royal Academy of Engineering. Ce rapport recommandait d'appliquer le principe de précaution en la matière, ce qui ne serait certes pas imprudent à tout le moins pour les matériaux en contact direct avec l'air intérieur, l'eau, les aliments, le sol et les êtres vivants.
À l'Université du Québec à Montréal, le Groupe de recherche interdisciplinaire sur la gouvernance, les risques, l'environnement, les technosciences, la santé et la société (GRETESS) suit ce dossier de près, notamment dans le domaine de l'alimentation. C'est notamment la quasi absence de réglementation dans ce domaine qui inquiète et qui devrait être comblée, réitéraient en 2013 des chercheurs indépendants affiliés à la Société royale des sciences britannique.
Et selon le Comité scientifique des risques sanitaires émergents et nouveaux de la Commission européenne : « les données et les connaissances scientifiques relatives aux caractéristiques des nanoparticules, leur détection et leur mesure, leur comportement au sein des systèmes vivants, et tous les aspects de leur nocivité potentielle pour l’homme et l’environnement, sont insuffisantes pour que des évaluations de risque satisfaisantes pour l’homme et les écosystèmes soient réalisées. »
Pour en savoir davantage : nanoquebec.ca