Version française de A new paradigm in EMF science, par Jeromy Johnson, ingénieur
Traduction : Pascal Airault - Lien vers toutes les références

 Groupe de compteurs intelligents Les immeubles collectifs ont souvent un groupe de compteurs intelligents juste à côté des appartements. Chaque compteur intelligent sans fil émet une impulsion de micro-ondes en moyenne 10 000 fois par jour, créant ainsi une dangereuse situation pour les habitants à proximité. © Karen Nevis
Groupe de compteurs intelligents Les immeubles collectifs ont souvent un groupe de compteurs intelligents juste à côté des appartements. Chaque compteur intelligent sans fil émet une impulsion de micro-ondes en moyenne 10 000 fois par jour, créant ainsi une dangereuse situation pour les habitants à proximité. © Karen Nevis

Cet article fut publié en 2016 dans The Bent, le magazine de la National Engineering Honor Society (Société honorifique nationale des ingénieurs américains). Cette Société compte 87 000 membres et la réponse générale fut assez enthousiaste. L'article résume succinctement comment la science des champs électromagnétiques (CEM) montre maintenant que la technologie sans fil peut abîmer notre santé. J'inclus aussi des pistes de solutions pour notre société.

J'ai commencé à interroger la trajectoire de notre culture il y a cinq ans, lorsqu'un groupe de compteurs intelligents sans fils fut installé sous ma chambre à San Francisco. En une semaine, ma femme et moi-même avions des maux de tête, de l'insomnie, des acouphènes, des palpitations cardiaques et de la grande fatigue. Avant, nous n'avions jamais eu ces symptômes et, lorsque nous quittions notre domicile, ils diminuaient. Après avoir cherché, j'ai trouvé que la même chose arrivait à des milliers de gens partout en Californie et dans d'autres états et pays dans lesquels les compteurs intelligents sans-fils étaient installés.(1)

Ce fut le point de départ de mon voyage dans l'information pour en apprendre le plus possible à propos des conséquences des CEM sur la biologie. Maintenant, j'ai un site Internet sur ce sujet et j'ai récemment donné une conférence TEDx intitulée « Le choc du sans fil » à l'université de Californie, au campus de Berkeley. Je vous encourage à visionner cette conférence avant de continuer à lire cet article, puisque cette conférence est une bonne introduction à ce sujet.

 Jeromy Johnson durant sa conférence TEDx.
Jeromy Johnson durant sa conférence TEDx.

Dans cet article, j'explore plus profondément et je donne plus d'information qu'une conférence de quinze minutes pour un public général ne l'autorise. Ci-dessous, j'examine le problème de base concernant l'augmentation exponentielle récente de la pollution aux CEM, l'évolution de la science des CEM et de possibles pistes de solution pour notre société.

 

Une reconnaissance

Avant de poursuivre, je veux reconnaître que je sais que ce sujet peut être controversé pour vous. Cela l'était aussi pour moi il y a cinq ans. Le consensus dominant dans notre société est que les CEM sont tout à fait sûrs aussi longtemps qu'ils ne vous chauffent ni ne vous électrocutent. Une grande partie de notre économie est fondée sur cette supposition, donc tout un chacun pourrait en conclure que cela doit être vrai.

Mon intention au cours de cet article n'est pas d'être provocateur. Mon intention est d'initier une discussion et d'encourager quelques-uns des plus brillants esprits des États-Unis d'Amérique à se rendre compte que nous ne voyons pas tous les tenants et aboutissants lorsqu'il s'agit de la sécurité/l'innocuité de la technologie sans fil.

Comme vous le constaterez dans cet article et dans vos propres recherches, il existe maintenant assez de preuves que des CEM faibles ont des effets néfastes sur la biologie. Ces effets pourraient entraîner de sérieuses conséquences pour le futur de notre civilisation : c'est une question que nous devons commencer à reconnaître pour que des solutions puissent être créées. Votre rétroaction et la continuation de cette discussion sont les bienvenues.

 Plus d'un million d'antennes cellulaires comme celle-ci seront installées sur les poteaux de services publics et lampadaires partout dans nos communautés d'ici 2020. Avec le déploiement de la technologie sans fil 5G, plusieurs pâtés de maisons auront 3-4 antennes – une pour chaque fournisseur de services sans fil.
Plus d'un million d'antennes cellulaires comme celle-ci seront installées sur les poteaux de services publics et lampadaires partout dans nos communautés d'ici 2020. Avec le déploiement de la technologie sans fil 5G, plusieurs pâtés de maisons auront 3-4 antennes – une pour chaque fournisseur de services sans fil.

La croissance exponentielle de la technologie sans-fil

Notre environnement électromagnétique a immensément changé au cours de la décennie et la technologie sans fil est destinée à croître encore plus vite dans les cinq prochaines années. Avant l'invention de l'iPhone, il y a huit ans, l'exposition électromagnétique de la plupart des gens était assez basse à moins qu'ils n'aient été des adopteurs précoces de la technologie sans fil ou qu'ils  n'aient habité à proximité d'une tour de téléphonie cellulaire ou d'une tour de radio.

Toutefois, aujourd'hui, le Wi-Fi est presque partout, même dans les écoles et les hôpitaux et des tours de téléphonie cellulaire relaient les données des téléphones intelligents. Nous avons aussi des montres intelligentes, des compteurs d'électricité, de gaz et d'eau intelligents, des thermostats intelligents, des maisons intelligentes et de nouveaux véhicules avec de puissants routeurs Bluetooth et Wi-Fi. Cette augmentation récente d'irradiation aux micro-ondes est sans précédent et ce n'est que le début.

La prochaine phase est la 5G et « l'Internet des objets », qui connectera tout ce que nous achèterons avec son unique adresse IP et son transmetteur sans fil. La « maison connectée » ou « l'appartement connecté » du futur pourra expérimenter jusqu'à un million de pulsations de micro-ondes par jour.

Pour que cela fonctionne et pour éviter d'avoir à tenir compte du pouvoir décisionnel de chaque communauté relativement à l'emplacement des tours de téléphonie cellulaire, les entreprises de sans fil s'arrangent avec le gouvernement pour installer de puissantes antennes cellulaires sur les poteaux de services publics, souvent à seulement dix à vingt pieds des habitations. Ce genre d'installation s'appelle le système des antennes distribuées (SAD) et est déployé en ce moment dans des villes telle que San Francisco, dans laquelle de nouvelles antennes sont installées sur la plupart des pâtés de maisons.(2) Beaucoup de villes des États-Unis auront ce système dans les prochaines années.


 © Nickolay Lamm
© Nickolay Lamm

Pour ajouter à cela, Google et Facebook sont en concurrence pour fournir leur service Internet à tout le monde. Par le biais d'initiatives tels que le « Projet Loon » de Google qui fera voler des ballons dirigeables avec des antennes Wi-Fi à 60 000 pieds(3), et du projet de Facebook proposant le système Wi-Fi Terragraph à 60 milliards de Hertz(4), notre société est entrée dans une nouvelle ère d'exposition électromagnétique. Toutefois, tout ceci est fait en présumant que la radiation de micro-ondes pulsées est complètement sûre.

 

La controverse entourant les CEM

« L'utilisation des CEM [de radiofréquences/micro-ondes utilisées par le sans fil] dans notre société est fondée sur des niveaux thermiques. L'idée est que si les CEM non ionisants ne vous chauffent pas, alors ils ne peuvent pas vous endommager. Or, il existe une abondance de preuves que les CEM causent des dommages biologiques. Ces preuves sont répétitivement exclues par les associations privées [ICNIRP] ainsi que par les agences gouvernementales définissant les niveaux de sécurité [FCC/USA, Santé Canada].

La raison de cette exclusion est d'ordre pratique. Dans les années 50, après l'invention de la technologie du radar à micro-ondes pendant la Seconde guerre mondiale, les utilisations militaires et industrielles de la technologie des micro-ondes furent considérées plus prioritaires que les potentiels effets délétères sur la santé. Les décideurs ont pensé que la guerre froide et la croissance économique étaient beaucoup plus importantes que la probabilité d'une maladie, par exemple un cancer, pour une partie de la population vingt ou trente ans plus tard.

Toutefois, les décideurs des années 50 et 60 n'auraient jamais pu imaginer que, soixante ans plus tard, notre société vivrait la dramatique explosion de la technologie sans-fil. Ils n'auraient pas non plus imaginer la situation difficile dans laquelle les décideurs politiques et industriels se trouveraient. Aujourd'hui, la croissance de la technologie sans fil a créé les entreprises les plus grosses et les plus rentables du  monde. La technologie sans fil est rapidement devenue une part intégrale de notre économie et récemment, l'un des secteurs de croissance fiable.

 La « maison intelligente » et « l'Internet des objets » sont certainement profitables, cependant ils comportent des risques sanitaires, d'intimité et sécuritaires sur Internet pour les familles. © Take Back Your Power
La « maison intelligente » et « l'Internet des objets » sont certainement profitables, cependant ils comportent des risques sanitaires, d'intimité et sécuritaires sur Internet pour les familles. © Take Back Your Power

Le sans fil est aussi une technologie incroyablement populaire qu'une part importante de la population utilise.(5) C'est principalement grâce à son aspect pratique, ainsi qu'au fait que les gens aiment bien communiquer. De plus, ce secteur économique fournit des impôts et des capacités de surveillance immenses pour le gouvernement, au travers de la collecte d'informations. Pour toutes ces raisons, aucun politicien ni aucun dirigeant d'entreprise importante ne sera capable d'admettre que les directives de sécurité [d'exposition aux CEM] ne protègent pas le public parce qu'elles ne sont pas conçues pour les expositions que nous connaissons aujourd'hui.

 

L'évolution de la science des CEM

L'étude des effets biologiques des CEM est un domaine très compliqué. Cette exploration nécessite des chercheurs comprenant les processus biologiques complexes aussi bien que les lois physiques et l'ingénierie des champs électromagnétiques. Lorsqu'une étude trouve des effets biologiques, ils doivent alors être reproduits. Cependant, si un seul des paramètres de l'étude est légèrement modifié, l'effet biologique peut être perdu. Les paramètres comprennent la fréquence, le schéma des pulsations, la puissance, la polarisation(7), ainsi que l'existence de plages pendant lesquelles les effets peuvent être plus prononcés à des niveaux de puissance plus faibles.

En outre, le financement pour répéter les études manque souvent, spécialement lorsque presque tout le financement pour ce type de recherche provient maintenant de sources industrielles qui ne voudraient point voir des résultats pouvant diminuer leurs profits.(8)

L'une des premières personnes à découvrir les effets biologiques de la radiation à micro-ondes à des doses non thermiques fut le biologiste Allan H. Frey. En 1975, le Dr Frey découvrit que la radiation à micro-ondes ouvrait la barrière hémato-encéphalique chez les rats, qui est très similaire à celle des humains.(9) Ce résultat expérimental fut reproduit dans les études subséquentes(10, 11) et cause une grande inquiétude parce que la barrière hémato-encéphalique joue un rôle vital pour protéger le cerveau des pathogènes, des toxines et des métaux lourds.

Beaucoup d'autres effets biologiques provoqués par les CEM non thermiques ont été trouvés au cours du temps.(12) Ceux-ci incluent le dommage aux spermatozoïdes, la perturbation du système nerveux, le mauvais fonctionnement du système endocrinien, des niveaux de sucre plus élevés dans le cerveau, des changements de comportement ainsi que des symptômes aigus tels que des maux de tête, de l'insomnie, des acouphènes, des difficultés de concentration et de la fatigue. En tout, plus de cent effets biologiques non thermiques ont été décrits dans les  milliers d'études effectuées dans ce domaine.(13) Tel qu'attendu, il y a aussi des milliers d'études ne montrant aucun effet biologique venant de l'exposition aux CEM [mais beaucoup moins et souvent financées par l'industrie ou des organismes qui n'ont pas intérêt à ce que leur nocivité soit confirmée].(14)

L'un des effets les plus déconcertants de la radiation à micro-ondes non thermiques est le dommage à l'ADN. La raison de cet étonnement est évident : le dommage à l'ADN peut mener au cancer et ce résultat crucial requerrait que les autorités passent à l'action. L'étude REFLEX, financée par l'Union européenne, examina ce problème précis. L'étude effectuée en 2004 était coordonnée par le docteur Franz Adlkofer à Vienne et les résultats publiés furent très inquiétants pour l'industrie de la téléphonie cellulaire et pour le public.(15) Les données montrèrent que la radiation du téléphone cellulaire cause des dommages à l'ADN.(16) Ce fut bien sûr une surprise, puisqu'il était précédemment admis que la radiation non-ionisante ne pouvait pas endommager l'ADN, parce que celle-ci n'était pas assez forte pour enlever un électron d'une molécule.

 Le test des comètes de l'étude REFLEX montre des résultats similaires pour les micronucléi de l'ADN, lorsque ceux-ci sont exposés aux radiations gamma et micro-ondes en provenance d'un téléphone cellulaire : des filaments se rompent et des effets génotoxiques apparaissent. © Université libre de Berlin, Chimie clinique
Le test des comètes de l'étude REFLEX montre des résultats similaires pour les micronucléi de l'ADN, lorsque ceux-ci sont exposés aux radiations gamma et micro-ondes en provenance d'un téléphone cellulaire : des filaments se rompent et des effets génotoxiques apparaissent. © Université libre de Berlin, Chimie clinique

Ainsi qu'il fallait s'y attendre, l'étude fut rapidement attaquée et un scientifique proéminent, ami de l'industrie, le docteur Alexander Lerchl, a affirmé que les données ont dû être faussées. La tempête médiatique résultante et la pression sur les chercheurs ainsi que sur leurs universités ont diminué l'impact de l'étude du docteur Adlkofer et ont empêché l'utilisation d'argent de l'Union européenne pour continuer la recherche. Toutefois, après une revue complète et une enquête, les résultats sont valables et, en 2015, la cour régionale de Hambourg en Allemagne, a forcé le docteur Lerchl à rétracter ses allégations et l'a condamné pour diffamation et calomnie.(17)

Test des comètes

Lerchl apparut aux informations plus tôt en 2015 pour une autre raison. Il dirigeait une étude qui était une réplique d'un projet de recherche datant de 2010(18) ayant trouvé que des signaux faibles de téléphonie cellulaire 3G promouvaient la croissance de tumeurs dans des souris.(19) Les résultats positifs [ayant trouvé un effet] de cette étude furent un autre coup porté à l'industrie du téléphone cellulaire.

Ces résultats confirmèrent que l'exposition des souris à un agent de cancer connu pendant leur développement fœtal, ENU, puis leur irradiation à la 3G d'un téléphone cellulaire, résultait en l'augmentation notable de la production de tumeur par rapport aux souris exposées seulement à l'ENU.(20) Dans un communiqué de presse de l'université de Jacobs à Brême en Allemagne, le docteur Lerchl a affirmé : « Nos résultats montrent que les champs électromagnétiques augmentent manifestement la croissance des tumeurs.(21) » Ceci est un changement récent et d'importance pour un scientifique ayant passé les deux dernières décennies à affirmer publiquement qu'il n'y avait pas de science valable montrant les effets biologiques des CEM non thermiques.

Toutefois, si la recherche montre de plus en plus que la radiation micro-ondes non-ionisante abîme l'ADN et promeut le cancer, quel est le mécanisme biologique ? Parce que, sans un mécanisme, il sera difficile pour la communauté scientifique d'accepter complètement ce nouveau paradigme.

Un mécanisme pour le dommage à l'ADN


 © Dr. Paul Dart et Martin Pall
© Dr. Paul Dart et Martin Pall

En 2013, le chercheur Martin Pall fit une découverte-clef nous aidant à comprendre ce nouveau paradigme.(22) Grâce à une revue de la littérature scientifique et à sa propre méta-étude, le professeur émérite de biochimie à l'université de l'État de Washington trouva que l'un des premiers effets non thermiques des CEM est l'activation des canaux calciques sensibles au voltage (CCSV/VGCC) dans la membrane plasmique des cellules. Lorsque les CEM activent ces canaux, de grandes quantités de calcium intracellulaire (Ca2+) sont produites. Cet excès de calcium dans les cellules cause une réaction chimique en chaîne provoquant un stress oxydatif et la production de radicaux libres.

Les effets des radicaux libres culminent dans le dommage fait à l'ADN.(23) Le diagramme ci-contre illustre le schéma de base de ce mécanisme. En bref, l'excès de calcium accroit directement l'oxyde d'azote (NO) dans les cellules. L'accroissement de l'oxyde d'azote peut avoir des effets thérapeutiques, ce qui est l'une des raisons pour lesquelles les effets non thermiques des CEM sont de plus en plus utilisés dans les traitements médicaux. Cependant, l'oxyde d'azote peut aussi interagir avec le superoxyde (OO-) pour créer du péroxynitrite (ONOO-). Lorsque le péroxynitrite se dégrade, il crée au niveau cellulaire des radicaux libres réactifs et un stress oxydatif(24) à l'origine de dommages à l'ADN et de diverses maladies.

Je vous encourage à lire les recherches du professeur Pall démontrant comment ce savoir peut être utilisé pour créer des technologies réduisant l'activation des CCSV - VGCC(25), ainsi qu'à regarder sa présentation récente à l'université d'Oslo en Norvège.(26) En plus de cela, le magazine de l'IEEE Power electronics a récemment publié un article résumant un mécanisme similaire pour des effets biologiques provenant de faibles CEM.(27)

Note de l'éditeur

Cet article fut écrit avant que les résultats préliminaires de l'étude remarquable du « National Toxicology Program (NTP) », ayant coûté 25 millions de dollars US, ne soient rendus publics plus tôt cette année. Ces résultats ont montré du cancer et des dommages à l'ADN chez les rats à des niveaux d'exposition nonthermiques aux micro-ondes. L'étude est tellement importante que même la Société américaine du cancer a dit qu'elle marquait « un changement de paradigme dans notre compréhension de la radiation et du risque de cancer. » Lorsque cette étude du NTP est combinée avec les nombreuses études de haute qualité montrant un risque accru de cancer et un dommage reproductif pour les utilisateurs à long terme des téléphones cellulaires, les gens continuant à affirmer que la technologie sans fil ne fait aucun dommage sont maintenant du mauvais côté de la science.

Protection du public

Nous sommes maintenant arrivés à un point à partir duquel il n'est plus possible pour les autorités de prétendre que les CEM non thermiques sont sécuritaires. Ceci arrive en même temps que l'expansion de la technologie sans fil à un rythme sans précédent.

À moins que quelque chose ne soit fait, dans les cinq prochaines années, une grande partie de notre civilisation sera inondée de niveaux de micro-ondes dont nous savons qu'ils causent des maladies. Aux États-Unis, l'entité administrative régulatrice qui pourrait changer le cours des choses est la Federal Communications Commission (FCC). Cette entité décide des niveaux légaux d'exposition. Toutefois, son principal objectif est en réalité d'augmenter et de suivre l'avancement de la technologie sans fil. La santé du public n'est ni sa préoccupation principale, ni son travail. C'est sans doute pour cela que la FCC ne protège le public que des expositions à des niveaux thermiques.

Pour complexifier encore plus le sujet, on croit que la FCC est lourdement influencée par l'industrie du sans-fil. En 2015, la School of Ethics de l'université d'Harvard et le journaliste Norm Alster ont publié un rapport sur cette situation appelé « Captured Agency. » 28 Monsieur Alster y détaille comment la porte tournante entre la FCC et l'industrie qu'elle est supposée réguler défavorise le public. Vous n'avez pas besoin de regarder plus loin que le directeur de la FCC, Thomas Wheeler, qui fut l'un des plus hauts membres du groupe de pression en faveur de l'industrie du sans fil au pays. Certains ex-membres de la FCC dirigent aussi des organisations proéminentes faisant pression en faveur de l'industrie du sans fil. Vous devriez noter que Norm Alster a aussi écrit à propos de l'éclatement de la bulle informatique et de la crise financière de 2008 avant qu'ils n'arrivent. Qu'il tourne maintenant ses aptitudes journalistiques considérables vers ce problème est très instructif.

L'un des aspects les plus frappants relatifs à la FCC est que cette agence n'a pas l'expertise pour déterminer la sécurité des CEM. Cette agence a la charge légale de l'un des problème de sécurité du public les plus importants, cependant elle ne prend vraiment aucune responsabilité. Au lieu de cela, elle compte sur des organisations privées et semi-privées pour l'informer. Ces organisations incluent l'IEEE le Bureau américain des normes  / American National Standards Institute (ANSI), le Conseil national de la radioprotection / the National Council on Radiation Protection (NCRP) et la commission international de protection contre la radiation non-ionisante / International Commission on Non-Ionizing Radiation Protection (ICNIRP) [totalement privée]. 29

[NDLR : Extrait du texte accompagnant le renvoi numéro 29 tiré des pages 7 et 8 du document du Federal Register : « Parce que la FCC ne prétend pas avoir l'expertise d'être une agence de santé de facto, elle prend en compte les opinions des agences fédérales de santé et de sécurité, ainsi que celles des instituts continuant de réfléchir aux expositions aux radiofréquences dans la formulation de ses [FCC] jugements. La FCC note que la communauté internationale a été active dans ce domaine, avec l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) initiant le programme de recherche international sur les CEM en 1996 et continuant ses efforts étendus dans ce domaine. La Commission internationale pour la protection contre les radiations non-ionisantes [association privée, ICNIRP en anglais] a publié des guides d'exposition en 1998 et l'Institut des ingénieurs en électricité et en électronique [IEEE] a publié une révision majeure de ses niveaux d'exposition en 2006. »]

Des organisations privées fixent les normes de sécurité publique

L'ICNIRP est l'une des organisations principales que les gouvernements occidentaux, y compris celui des États-Unis, utilisent pour fixer les normes de sécurité de la radiation des micro-ondes. 30 Toutefois, il y a un problème avec l'utilisation d'entités privées pour quelque chose d'aussi important que la sécurité du public. De petits groupes privés peuvent aisément être manipulés par des groupes d'influence et par la pression venant des intérêts industriels et militaires. Les organisations privées peuvent aussi coopter les membres ayant un certain biais envers la science des CEM, sans commentaire ni avis du public. C'est une façon de faire hautement antidémocratique de choisir des gens responsables de décider si la technologie que nos enfants et petits-enfants utilisent tous les jours est vraiment sûre.

Le professeur Dariusz Leszczynski, docteur en biochimie finlandais, est un scientifique accompli, versé dans les radiofréquences (RF), ayant écrit à propos des dangers de cette situation. Il siégeait au trente et unième comité de l'OMS qui, en 2011, a déterminé que la radiation micro-ondes à des doses non thermiques était « peut-être cancérogène » (classe 2B). 31 Dans un article récent, il a noté que les membres actuels de l'ICNIRP, ainsi que les nouveau membres arrivant pour leur mandat de 2016 à 2020 sont connus pour entretenir les mêmes opinions à propos de la sécurité des CEM. 32

C'est-à-dire qu'ils croient :

• que les CEM ne causent aucun effets sur la santé ;

• que la sensibilité humaine aux CEM n'existe pas ;

• que le seul mécanisme biologique concernant les CEM de RF est thermique

• et que les effets biologiques non thermiques n'existent pas.

Si nos normes de sécurité sont fixées par une entité privée non imputable constituée de membres déjà biaisés contre la quantité considérable d'études montrant des effets délétères biologiques causés par les CEM/RF de niveau non thermiques, alors il est probable que nous ayons tous les ingrédients pour une crise de santé publique majeure.

Ce que j'ai partagé pourrait être considéré comme de mauvaises nouvelles. Mais des solutions existent.

Au plan personnel, il y a beaucoup de choses que vous pouvez faire pour rendre votre logement, votre bureau et l'école de votre enfant plus sûrs d'un point de vue électromagnétique.

Voir ici les premières étapes pour limiter votre exposition à la technologie sans fil et ce qui peut être fait dans votre logement. En appliquant ces solutions, vous pouvez commencer à minimiser les niveaux d'exposition de votre famille en attendant que la volonté politique survienne pour créer des solutions à grande échelle.

Les solutions existent aussi au niveau sociétal et c'est à ce niveau que les ingénieurs peuvent être d'un grand secours. L'une des premières solutions est de câbler notre société avec de la fibre optique. Utiliser de la lumière pour transmettre des informations ne crée aucun CEM, sauf aux interrupteurs. La fibre optique est aussi « à l'épreuve du futur », parce qu'elle offre une bande passante presque illimitée. Ceci permettra à nos industries techniques de prospérer, puisque la bande passante ne constituera plus un facteur limitant. Trouver des moyens économiques d'apporter la fibre optique jusqu'à, et dans, chaque logement sera un avantage pour notre société. Il existe déjà des entreprises faisant cela 33, 34, 35 et une entreprise exerçant en Allemagne et en Autriche a déjà développé une technique pour enlever le câble existant et le remplacer par une fibre optique.

Nous pouvons aussi créer des produits plus sûrs.  Ceci inclut de baisser l'énergie émise [irradiée] par les équipements sans fil des particuliers pour que les émissions ne soient pas seulement à l'intérieur des indications de la FCC mais aussi à des niveaux déterminés sûrs pour les utilisateurs.

Selon les travaux du docteur Pall et d'autres, il est possible qu'il y ait certaines combinaisons de fréquences, polarisation, pulsation et puissance ayant peu d'effets  biologiques. Cela nécessitera une recherche très compliquée pour déterminer ces combinaisons, mais une fois que nous admettons qu'il y a un problème, ce travail commence sérieusement et aidera énormément notre société.

Pour l'instant, l'une des plus importantes actions que nous pouvons faire est de limiter le déploiement de la technologie sans fil aux utilisations strictement nécessaires et de façon à ne pas surexposer directement les humains, spécialement les enfants. Notre développement insouciant de la  technologie sans fil doit s'arrêter.

Un chemin plus intelligent pour aller de l'avant est nécessaire si nous voulons avoir une société technologique qui est aussi sûre pour les humains. Je crois que reconnaître l'importance de ce problème dirigera notre société dans une direction bénéfique. Cela marquera aussi la naissance d'industries entières dévouées à la création d'une technologie plus sûre. Des entreprises et des idées valant des milliards de dollars peuvent être créées à cette nouvelle frontière.

Vous avez peut-être déjà une idée pouvant servir aux parents pensant demander maintenant une technologie plus sûre pour leurs enfants. En tant qu'ingénieurs, créer une société saine avec une technologie incroyable serait un véritable changement de paradigme et l'une des plus grandes réalisations que l'on puisse accomplir.

J'espère que vous vous joindrez à moi dans cette grande aventure.

 

Article d'origine publié dans The Bent

PDF de cet article publié sur le site de Jeromy Johnson

Version espagnole

Jeromy Johnson détient un baccalauréat et une maîtrise en Science en ingénierie civile de l'Ecole des mines et de la technologie du Dakota du sud. Pendant ses études, il fut le président de la section Tau Beta Pi de 1998 à 1999. Il s'intéresse aux effets des CEM et aux solutions pour une technologie pus sûre. L'on peut écouter ici sa conférence TEDx "Wireless Wake-Up Call".